Économiecrise économiqueFPContenu payant

Laurent Herblay : « Il est trop tôt pour parler de stagflation »

ENTRETIEN. Energie, alimentaire, guerre…Dans un contexte européen tendu, la hausse prolongée des prix met à rude épreuve les ménages français. On fait le point avec Laurent Herblay, gaulliste social et auteur du livre Oligarchisme et déconstruction de la démocratie (éd. Librinova).

/2022/05/STAGFLATION-LAURENT-HERBLAY


Front populaire : Pouvez-vous nous expliquer théoriquement le phénomène de la « stagflation » dont on parle en ce moment ?

Laurent Herblay : La stagflation est un terme qui a été popularisé dans les années 1970 quand, après le premier choc pétrolier, l'Occident a subi en même temps un fort ralentissement de la croissance et une forte augmentation de l’inflation. Alors, la moindre concurrence internationale et le plus faible niveau du chômage ont provoqué une course entre les salaires et les prix qui a poussé l’inflation structurellement au-delà de 10% dans bien des pays dits occidentaux.

Cette séquence a été le prélude aux politiques oligarchistes d’abord popularisées par Thatcher et Reagan. Elles ont fait de la faible inflation un objectif prioritaire sans se préoccuper de l’évolution du pouvoir d’achat. Elles ont aussi promu un recul généralisé de l’État et des services publics, une baisse de la fiscalité pour les plus riches et les entreprises – au prétexte, depuis longtemps infirmé, du ruissellement – et une libéralisation généralisée des mouvements de biens et de capitaux.

Après plus de trois décennies de très faible inflation, le fort rebond actuel, en parallèle avec la chute de la croissance, réveille la crainte de la stagflation. Mais la comparaison est pour le moment extrêmement hâtive, a minima pour tous les pays qui conservent un niveau de chômage important, comme la France, pour trois raisons :

  • Le rebond de l’inflation reste moins important que dans les années 1970, et s’il est important, c’est aussi parce que la crise sanitaire avait pesé à la baisse sur les prix, poussant l’inflation à zéro fin 2020. Il faudra encore attendre une année pour avoir confirmation, ou non, du caractère structurel de ce rebond, qui n’est pas encore avéré.


  • En outre, nous sommes dans un contexte économique différent, où la forte libéralisation de circulation...

Vous aimerez aussi