Nation ou Patrie : deux termes presque homonymes, mais pas tout à fait. Étymologiquement, selon le dictionnaire latin Gaffiot, patrie vient du latin pater, le père — par extension sur le territoire des ancêtres, une donnée concrète — alors que Nation vient de natio, la naissance, mais aussi de « Natus, participe passé de nascor (naître) — formé par la naissance — fils de. » Une notion plus complexe. Le dictionnaire Littré au XIXe siècle la définit comme « une réunion d’hommes (…) ayant depuis longtemps des intérêts communs ».

Mais c’est cette conférence de Renan qui est le texte essentiel pour cerner et mieux comprendre cette idée de nation — même s’il traite spécifiquement de la nation française.

La nation : visions germanique et française

Il convient de rappeler les circonstances dans lesquelles cette conférence est prononcée : la défaite française de 1870 devant la Prusse est encore dans tous les esprits par le choc profond qu’elle a créé, notamment par la perte de l’Alsace-Lorraine.

Renan se positionne par rapport à une vision germanique de la nation, à l’origine de l’élaboration de la nation allemande autour de la Prusse. Cette vision remonte à 1807 avec le Discours à la nation allemande de Johann Gottlieb Fichte. Il s’agit d’une conception plus « essentialiste » de la nation, basée sur la culture, la langue, la religion et la race et, donc sur des notions bien différentes de celles que va retenir Renan. Cette conception sera encore renforcée par l’influence d’un autre philosophe allemand, Hegel, pour qui la nation n’est que l’âme d’un pays, qui doit, pour exister, s’incarner dans un État fort. Les idées de Fichte et Hegel expliquent la montée de la menace prussienne contre la France déjà avant 1870.

Renan va définir clairement ce qu’est une nation pour les Français par opposition à la vision ethnique...

Paul Fesquet

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