Hôpital public : comment en est-on arrivé là ?
OPINION. Fermetures de lits régulières, temps d’attente interminables aux urgences, pénurie chronique de personnels soignants, manque de matériel, sélection des patients en soins critiques… Généalogie du mal qui ronge l’hôpital public.
L’hôpital public, depuis son lointain ancêtre Hôtel Dieu, financé et administré par les rois, clergés, ordres hospitaliers et bienfaiteurs successifs, a eu comme mission, je dirais même comme vocation au sens spirituel, d’accueillir tous les malades, particulièrement les plus humbles, qu’on entassait dans des salles communes et même pendant longtemps dans les mêmes lits. Les médecins, assistés de religieuses et religieux, les y soignaient. Les progrès de la médecine et de la chirurgie (Ambroise Paré, Laënnec, Pasteur, Charcot) sont dus aussi à ces « cobayes » qui pouvaient ainsi bénéficier de soins gratuits.
Cette dimension charitable avait donné à l’hôpital public, en raison de la gratuité des soins et de la pauvreté des malades qui le fréquentaient, une connotation péjorative, ceux qui avaient les moyens de se soigner le faisaient à leur domicile ou plus tard dans les maisons de santé privées. Les différentes épidémies ou pandémies (pestes, tuberculose, grippe espagnole) si elles ont renforcé considérablement le recours à l’hôpital n’ont pas pour autant redoré son blason. Il a longtemps véhiculé l’image d’un lieu de soins où on venait mourir.
Et pourtant une recherche médicale brillante, mondialement reconnue pour ses découvertes et innovations (premières vaccinations, stéthoscope, techniques anesthésiques et chirurgicales nouvelles, naissance de la psychiatrie moderne…) s’y exerce faisant de l’hôpital public un lieu d’enseignement indispensable et reconnu dans lequel les médecins font obligatoirement leurs premières armes même s’il reste encore profondément marqué par un aspect humanitaire et caritatif qui en éloigne souvent les médecins illustres et les malades favorisés.
La réforme Debré de 1958 a pour objectif de donner à l’hôpital lustre et attrait grâce à la création des CHU (Centre Hospitalo-Universitaires) qui officialise la double fonction de ces établissements publics : enseignement/recherche et soins toutes spécialités confondues. Le but de cette réforme était aussi de faire revenir à l’hôpital de grands...