L’utilité commune : l’égalité des libertaires
OPINION. Pendant la Révolution, le courant libertaire a fait émerger la notion d’utilité commune, une conception de l’égalité fondée sur l’apport de chacun à la société. Notre abonné nous en fait la synthèse, à travers sa quête personnelle de l’émancipation humaine.
Inspiré spirituellement par mon grand-père paternel, qui s’engagea dans la résistance aux nazis et survécut aux sévices de la Gestapo et aux brimades des gardiens du camp de concentration de Ravensbrück, je me suis naturellement intéressé à la philanthropie, afin de comprendre pourquoi il avait pardonné au peuple allemand. Dans les pas de mon aïeul, je m’efforce modestement de défendre la dignité et l’altérité humaine, deux valeurs universelles, me semble-t-il. La méthode ne peut être que progressive, la pensée discursive m’aide à développer mon sens critique, j’avance pas à pas dans ma compréhension des choses humaines, et j’explore les aspects contradictoires de la philosophie. Toutes les connaissances doivent être acquises par la raison, par l’étude, et par la recherche des causes premières. Je ne me contente pas de décrire ou de commenter ce qui existe, je m’efforce de comprendre l’essence profonde de l’homme social. L’oppression sociale repose sur l’existence d’appareils de gouvernement permanents et distincts de la population qui forgent l’idéologie dominante. Les dominants exploitent à leur profit la vraie nature humaine et ses pulsions animales, telles que la sexualité, le goût du pouvoir, l’agressivité, l’ego ou la peur de la mort.
Pendant la révolution, le courant libertaire, conscient de ces menaces dominantes contre la liberté et l’égalité, a inventé la notion d’« utilité commune ». En 1796, Sylvain Maréchal autour du Manifeste des égaux, déclara devant la Convention : « Nous réclamons l’égalité d’une voix forte, et on nous répond : taisez-vous misérables ! L’égalité de fait est une chimère, contentez-vous de l’égalité conditionnelle, vous êtes tous égaux devant la loi. » Depuis cette date, perdure entre l’élite dominante et le reste du peuple cette confusion sur la nature de l’égalité. Pour ce courant révolutionnaire et libertaire, les distinctions de fortune ou de reconnaissance doivent être fondées sur la compétence et l’apport à la société.
Condorcet...