Salon de l’agriculture : le « président même pas peur »
CONTRIBUTION / OPINION. L’attitude impassible d’Emmanuel Macron face aux paysans en colère au salon de l’agriculture en a interloqué plus d’un. Retour sur une séquence hallucinante d’un président toujours plus déconnecté en quête de provocation.
« Qui aurait dit que douze heures plus tard on se retrouverait ici à continuer d’avancer et de travailler ? » L’homme qui prononce ces mots se tient fièrement devant micros et caméras en cette fin d’après-midi du 24 février, jour d’ouverture du salon de l’agriculture. Il nous dit qu’il est le président de tous les Français, mais on reconnaît plutôt celui en mode « qu’ils viennent me chercher » des Gilets jaunes. Il arrive à cacher sa jubilation, non parce qu’un sixième sens lui susurre qu’elle serait mal placée, mais en raison de la fatigue inévitable au terme d’un si long marathon contre vents et marées.
Emmanuel Macron, n’écoutant que son courage, a donc fait comme il l’entendait. On lui avait laissé entendre qu’il ne serait pas le bienvenu, qu’il ne pourrait déambuler comme il est coutume aux présidents de le faire pendant des heures entre vaches, veaux et moutons. Il a gagné. Il a gagné contre le peuple et il semble très satisfait de lui. Ses objectifs ont été atteints. C’est tout juste si dans sa liesse intérieure il n’a pas joint à ses paroles le geste que son Garde des Sceaux admoneste habituellement à l’opposition, à la Chambre des députés. Mais l’idée y était.
Le plan de la caméra est étroit. S’il était plus large, il montrerait les travées vides du grand hall dépeuplé des visiteurs et des agriculteurs tenus à l’écart, chassés par la maréchaussée du Prince. Les compagnies de gendarmes et de CRS, une première pour un salon, sont déployées, dont la fameuse CRS 8, celle que son ministre de l’Intérieur réserve habituellement aux hordes de dealers ensauvagés, aux Kevin et aux Mattéo des banlieues en rébellion. Macron a visité un hall « Potemkine », aseptisé comme ces villages où il se rendait après sa loi sur les retraites quand les manants...