Qu’est-ce que le pouvoir ? Qui en a et qui n’en a pas ? Existe-t-il des lieux de pouvoir ? Le pouvoir se transmet-il ? De grands pouvoirs impliquent-ils de grandes responsabilités, comme le prétendent certains films hollywoodiens ? Tient-il dans la main et peut-il donner l’heure ? (Réécouter Le schmilblick de Coluche)

La méthode heuristique, même si elle finit parfois en plaisanterie, a le mérite de poser le décor, d’en dessiner les contours. Pour entrer dans le vif du sujet, je propose la thèse enseignée dans toutes facultés de Sciences Po : le pouvoir n’est pas un attribut (objet : amulette, sceptre, couronne ; une marque de naissance, le sang « bleu »…), mais bien la qualité d’une relation sui generis. À l’instar de l’énergie, qui en physique se manifeste par la capacité à réaliser un travail (dans son acception idoine), le pouvoir se constate toujours a posteriori : c’est la capacité d’un sujet A à obliger un sujet B à agir (ou pas), en fonction des volontés du sujet A. Le pouvoir consiste donc par essence en un rapport de force. Si on veut être complet, la relation en question peut aussi concerner un individu avec un animal (dompteur de lions, pâtre, maître-chien…) ou un objet (la maîtrise d’un véhicule). Dans ce second cas, on parlera de compétences : le pouvoir par la connaissance (« le savoir, c’est le pouvoir »).

Le pouvoir est essentiellement de nature économique (pots-de-vin), idéologique (manipulation), militaire (coercition) ou charismatique (sexuelle). Il convient à cet égard de distinguer résolument le pouvoir de ses instruments (et leurs limites) : un tas d’or ou une femme plantureuse laissera indifférent l’ascète, le soldat patriote ne reculera pas face à un ennemi supérieur en nombre et en armes, le sage écartera les sophismes d’un revers de main univoque et serein. Le pouvoir, son exercice, s’inscrit dans le paradigme de la...