Tragiques

Les tragiques résonances d’Aggripa d’Aubigné

La lecture desTragiques, texte publié par Agrippa d’Aubigné en 1616, résonne singulièrement en notre époque. Extraits choisis…

/2020/07/CAJT

Presque par hasard, je retombe sur cette œuvre que constitue Les Tragiques de Théodore Agrippa d’Aubigné. Le souvenir que j’en gardais me venait du lycée où mon professeur, passionné et passionnant, avait su rendre contagieux son amour de l’histoire et de la littérature. Cette épopée moderne publiée en 1616 a été à l’époque imprimée par d’Aubigné lui-même, sous pseudonyme, pour éviter la censure. Il est vrai que l’œuvre n’épargne pas les princes d’alors ni même l’Eglise, comprise en tant qu’institution. L’auteur, s’il est partial, prenant fait et cause pour les protestants, a à cœur d’établir le « tableau piteux du royaume [de France] en général», des calamités et des guerres civiles qui le désolent, désolation dont il tient responsable les princes de l’époque.

Dès le sommaire des sept livres des Tragiques, Agrippa d’Aubigné donne le ton.

« Il [Le poète] a dit adieu aux chants d’amour de sa jeunesse; un autre feu l’enflamme : l’amour de sa malheureuse patrie. — Tableau des misères de la France noyée dans son sang. C’est une mère épuisée par ses nourrissons et sur le sein de laquelle s’égorgent ses propres enfants. Exaction des financiers et justiciers. Tyrannie des rois, qui se font les loups dévorants du troupeau dont ils devraient toujours être les bons bergers »

A la relecture de cette épopée, je n’ai pu m’empêcher d’établir des parallèles avec notre temps. Certains vers frappent encore aujourd’hui et résonnent étrangement. J’ai ainsi voulu partager avec vous le fruit de ces tragiques résonnances.

Pour les passages cités, j’ai choisi de garder le texte tel qu’il est reproduit dans l’édition de Charles Read publiée en 1896.

Extrait du premier livre qui traite des Misères

« Les places de repos sont places estrangeres,

Les villes du millieu sont les villes frontieres ;

Le village se garde, et nos propres maisons...