Alexandre del Valle : « Le sommet des Brics a été une démonstration de force symbolique pour Vladimir Poutine et un refus global de l’unipolarisme occidental »
ENTRETIEN. Après le sommet des Brics, réuni en Russie, Alexandre del Valle décrypte ce qui en est ressorti. Au-delà de la rhétorique en partie anti-occidentale, cet événement a montré que le président russe était loin d’être isolé sur la scène internationale. Malgré les désaccords existant entre eux, les Brics sont unis pour façonner un ordre mondial "post-occidental".
Front Populaire : Le sommet des BRICS 2024 est le 16e sommet des BRICS qui s’est tenu du 22 au 24 octobre 2024 à Kazan en Russie. Que faut-il en retenir ?
Alexandre del Valle : Les BRICS, groupe qui comprend notamment la Chine, l’Inde, le Brésil et l’Iran, sont beaucoup plus prudents qu’on ne le croit. Les déclarations faites et les décisions prises durant ce sommet ont paru même un petit peu minimalistes. Les Brics ne se posent pas ici comme des ennemis des institutions internationales créées depuis 1945, mais ils appellent à respecter celles qui sont vraiment multilatérales, comme l’ONU, appelée, certes, à se réformer, et à en faire les acteurs institutionnels du monde de demain. Certains pays du Sud demandent depuis plusieurs années à avoir un poids plus important. L’Inde souhaite devenir un membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU ; d’autres membres des BRICS veulent que ce rival du G7 que sont les BRICS, d’ailleurs composés de pays pas du tout « amis » ni « alliés », comme la Chine et l’Inde, aient un rôle rééquilibré par rapport à leur poids dans le monde. Ils souhaitent un meilleur partage du gâteau global, mais les BRICS sont tout sauf une alliance ennemie de l’OTAN, car leurs membres sont très différents et parfois adversaires entre eux comme l’Inde et la Chine.
Sur le terrain de la dédollarisation, la Russie et la Chine veulent promouvoir un nouvel ordre monétaire mondial, et le sommet de Kazan a fait un écho à ce projet tant médiatisé,...