Le ciel est gris, il fait froid et humide, un vrai temps de chien à rester enfermé bien au chaud, qui refilerait le bourdon au plus optimiste d’entre nous. Je décide d’allumer la télé, et pour me remonter un peu le moral, je mets les informations. Quelle évolution depuis le temps d’avant, où les chaînes d’infos en continu nous balançaient toute la misère du monde et nous cantonnaient à vivre la violence quotidienne de plus en plus près, parfois si proche que nous en étions victimes… Mais cela a bien changé. Là, les informations sont diverses et presque toutes joyeuses ; instructives, elles nous montrent un monde en recherche d’équilibre. La beauté serait pour bientôt, nous y œuvrons, chacun à notre mesure, mais tous dans la même direction. Entre plaisirs et fiertés partagés dans ce monde apaisé. Quelques violences subsistent malgré tout, et ce matin, les informations exposent malheureusement l’une d’elles. Un meurtre sur fond de violences sexuelles commises par un détraqué, très vite interpellé et emprisonné dans l’attente de son jugement. Mais l’essentiel des informations tourne sur la victime. On la présente belle et pleine d’entrain, on loue sa vie, son engagement pour ce monde en devenir, riche en promesses pour cette jeune femme… Les journalistes rendent un hommage appuyé et sincère à cette victime de la rare insécurité qui subsiste dans notre société.

Le meurtrier sera jugé rapidement. La connaissance de sa vie, de ses éventuels troubles psychologiques, de son passé sûrement mouvementé, voire de ses souffrances d’enfant maltraité refaisant surface, alimentera les discours des avocats, mais dans le seul but de lui permettre de purger sa peine au sein d’un établissement pénitentiaire qui lui corresponde, alliant privation de liberté et soins adaptés. À aucun moment la victime ne sera oubliée. À aucun moment le juge ne parlera...