Jugement majoritaire : la fausse solution
OPINION. Renouveau démocratique, solution à l’abstention… Malgré l’échec de la Primaire populaire, le scrutin au jugement majoritaire a bénéficié d’un sacré coup de projecteur… largement non mérité, selon notre lecteur.
Chacun a découvert le jugement majoritaire à l’occasion de la Primaire populaire. Précisons d’emblée que Christiane Taubira eût été victorieuse avec toute méthode de vote autre que le jugement majoritaire tant une large proportion de votants la plébiscitait par rapport à ses rivaux.
À partir d’évaluations qualitatives allant de « Insuffisant » à « Très Bien » données par chaque votant à chaque candidat, le principe du jugement majoritaire est de déterminer pour chaque candidat une évaluation médiane (celle qui sépare sur l’ensemble des évaluations la moitié des notations les plus positives des moins positives), le gagnant étant celui qui obtient la meilleure évaluation médiane.
Élaborée par les deux scientifiques Rida Laraki et Michel Balinski, cette méthode se veut optimale. Leur analyse semble le montrer, tout au moins comme processus d’évaluation globale entre différents candidats, en dépit du degré de subjectivité de chaque votant pour qualifier ses évaluations (c'est-à-dire mettre « Bien » au lieu de « Assez Bien » par exemple).
Pour autant, le jugement majoritaire garantit-il la légitimité du gagnant que l’on attend d’une élection démocratique ? En particulier, l’influence de chaque électeur est-elle la même dans le choix final du gagnant ? Le gagnant est-il explicitement et systématiquement choisi par une majorité d’électeurs de sorte que la minorité puisse l’accepter ? Le raisonnement simple suivant pour deux candidats montre le contraire. Si un candidat A est désigné vainqueur sur un candidat B par le jugement majoritaire, c’est que l’évaluation médiane de A (par exemple « Bien ») est supérieure à celle de B (par exemple « Assez Bien »). Or le niveau relatif de ces deux évaluations médianes ne dépend que d’une partie des électeurs, car la hiérarchie du vote des électeurs qui ont évalué A et B sous l’évaluation médiane de B n’entre pas en ligne de compte. Ainsi, si une majorité de ces derniers préfèrent B (avec par exemple une...