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L’Europe a sacrifié notre agriculture!

Jean-Paul Pelras, ancien maraîcher, arboriculteur et syndicaliste, raconte le gouffre qui sépare les promesses d’une harmonisation européenne faites dans les années 90 et la réalité d’aujourd’hui.

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C’était une époque compliquée, au cœur des années 90. Il fallait dénoncer les distorsions sociales et fiscales, vider des camions à la frontière franco-espagnole pour susciter des incidents diplomatiques, faire valoir contre vents et préfets nos spécificités méditerranéennes. Les affrontements avec les gardes du cardinal de service étaient fréquents, les séjours en prison et à l’hôpital également.

Et puis le temps s’est écoulé. Nous avons perdu beaucoup de fantassins. Certains sont partis beaucoup trop tôt et pour trop longtemps de l’autre côté du chronomètre. D’autres ne sont plus agriculteurs, ils font la circulation devant les écoles, travaillent dans les travaux publics ou, comme moi, sont devenus journalistes.

J’y ai cru. Oui, j’y ai cru. Je pensais que l’Europe allait harmoniser tout ça. Que l’on allait taxer et contrôler les 5000 camions transitant alors chaque jour par la frontière franco-espagnole. Il en passe plus de 20 000 aujourd’hui... Entre temps, dans le Midi de la France, les deux tiers des surfaces cultivées en fruits et légumes sont retournés à la friche et 3 paysans sur 4 sont sortis des radars.

Notre pays totalise 400 000 paysans contre 10 millions au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Elle compte, pour ne citer que ces exemples, 2.2 millions de joueurs inscrits dans des clubs de football, un peu plus de 1.5 millions de pécheurs, 1.1 millions de joueurs de tennis, 300 000 joueurs de pétanque licenciés et, plus globalement, 21 millions de personnes adhérentes à des associations…

La « dure réalité à étreindre »

Voilà des chiffres qui passionnent les politiques, car derrière chaque quidam se dissimule un électeur. Voilà des mains intéressantes à serrer quand il faut couper un ruban. Quand il faut remettre quelques maillots ou le trophée récompensant la triplette gagnante et le plus beau brochet.

Mais des paysans …, ces emmerdeurs qui...

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