Lettre de soutien d'un universitaire à Florence Bergeaud-Blackler
CONTRIBUTION / TRIBUNE. En raison de ses travaux universitaires sur l’entrisme des Frères musulmans en Europe, l’anthropologue Florence Bergeaud-Blacker est la cible de menaces et de diffamation. Stéphane Valter, professeur agrégé en langue et civilisation arabes à l'Université de Lyon 2 et docteur en science politique, lui apporte son soutien et appelle à défendre la liberté d'expression dans la recherche.
Je prends la plume pour défendre la liberté de penser et faire taire les présomptueux. Je ne connais pas Florence Bergeaud-Blackler en personne, et n’ai que parcouru son livre, Le Frérisme et ses réseaux : L’enquête, que je lirai pendant les vacances. Mais d’ores et déjà, ce que je puis dire est que le sujet est traité avec sérieux, même si on peut contester tel ou tel point, naturellement. Évidemment, on pourrait reprocher à Florence Bergeaud-Blackler de ne pas maîtriser suffisamment la langue arabe… Mais pour ma part, depuis que je suis entré dans la profession, je n’ai jamais entendu un arabisant ne pas dire d’un autre qu’il ne parlât pas bien arabe ! Et pour certains, est-ce un gage que d’avoir une onomastique avantageuse ?
En ce qui me concerne, je n’ai quasiment rien appris sur les Frères musulmans (Égypte, Syrie) depuis mes études sous la direction du professeur Olivier Carré (dans les années 1980 à Paris 3). Tout le reste ne fut globalement que pâle répétition. Quant aux Frères musulmans en France, à peu près vers la même époque, j’en ai fait l’expérience très concrète, à Paris et dans sa banlieue, puis en Tunisie et en Syrie. Les analyses de Florence Bergeaud-Blackler me semblent donc globalement converger vers les miennes, si ce n’est que je ne me suis jamais intéressé vraiment à cette forme d’islam peu évoluée, dogmatique, que je trouve bizarre, car elle constitue une expression quasi clinique d’une compréhension idéologique étriquée d’une religion qui a pourtant plusieurs aspects positifs (et aussi négatifs, comme toutes les religions).
Injures et intimidation en guise de contre-argumentation
Gilles Kepel, dans son introduction, résume bien à mon sens toute la question avec une formule bien tournée : les Frères musulmans revendiquent avec duplicité le port du fichu pour les femmes, comme une liberté fondamentale,...