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Ultra-riches et sous-prolétariat : deux parasitismes en miroir

Pour Régis de Castelnau, la France est prise en tenaille entre deux composantes de sa démographie, tout aussi minoritaires et nuisibles l’une que l’autre. D’une part l’oligarchie, qui domine la vie politique, médiatique et culturelle du pays. D’autre part, la frange délinquante de la population de banlieue, à qui le pouvoir a abandonné l’espace public.

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Dans un ouvrage récent et remarqué (L’Archipel français, éd. du Seuil, 2019), le sondeur Jérôme Fourquet emploie le terme « d’archipel français » pour décrire les nouvelles segmentations communautaires et identitaires qui divisent aujourd’hui notre pays et dont les anciens modèles d’analyse ne peuvent plus rendre vraiment compte. Car force est d’admettre que la lutte des classes a cessé d’expliquer les tensions au sein de notre société. Certes, la classe ouvrière existe toujours en Occident, mais « c’est la conscience de classe qui a disparu », pour reprendre l’expression de l’historien britannique Eric Hobsbawm. Depuis trente ans en effet, la désintégration de l’URSS et du monde « socialiste », ainsi que la globalisation, ont rebattu les cartes. Et l’opposition entre la gauche et la droite n’est plus tellement opératoire, comme le montre le politologue Jérôme Sainte-Marie dans Le Nouvel Ordre démocratique (éd. du Moment, 2015), qui postule l’émergence à sa place d’un nouveau clivage entre « bloc élitaire » et « bloc populaire ». Une théorie qui rejoint d’ailleurs les travaux du géographe Christophe Guilluy, dont le dernier livre Les Dépossédés (éd. Flammarion, 2022) est un sévère réquisitoire contre la bourgeoisie française et la manière dont celle-ci s’est ingéniée depuis plusieurs décennies à éloigner les couches populaires des lieux de pouvoir, d’éducation et de culture. Pour Sainte-Marie comme pour Guilluy, il est urgent, dans l’intérêt national, de réinstaller la classe ouvrière au centre de la vie publique. Seulement, la tâche ne sera pas aisée. Car l’oligarchie dispose de considérables moyens pour imposer le statu quo…

Mais d’abord, qu’est-ce que l’oligarchie ? Il s’agit de l’ensemble des super-riches, dont la fortune, considérable, a essentiellement été constituée avec l’appui des pouvoirs publics et l’utilisation de la corruption. Aidé par divers représentants de la couche moyenne supérieure, issu dans la majorité des cas de la haute fonction publique d’État, ce groupe social...