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Le monde paysan face à la loi du marché

Dans le milieu agricole comme ailleurs, la loi du marché est aussi celle du plus fort. Les agriculteurs français subissent les chocs de compétitivité du marché mondial et la prise de pouvoir des oligopoles. Qui les sauvera de la jungle planétaire ? Personne. Et ils le savent.

/2023/12/PHGREGOIRE


F.P. : Comme la plupart des secteurs économiques, le monde agricole est soumis aux contraintes de l’économie mondialisée qui le met en concurrence avec le monde entier. Cette mondialisation a été présentée comme une chance. Qu’en pense l’agriculteur que vous êtes ?

Philippe Grégoire : Cette mondialisation ne fonctionne tout simplement pas, sauf à se placer du point de vue de la petite minorité qui en bénéficie. Sur 2 639,1 milliards d’euros du PIB de la France en 2022, il y a environ 850 milliards qui sont investis dans ce que j’appelle le PIB mondialisé (l’agriculture et une partie des 1 255 milliards d’euros de l’industrie) à savoir le PIB soumis à la concurrence internationale. Pour l’agriculture, cela correspond à 76 milliards d’euros de chiffre d’affaires, voire 82 milliards si on incorpore les entrepreneurs agricoles. Ce modèle-là ne fonctionne pas. Si je me réfère à la théorie de David Ricardo dite de l’avantage comparatif, où chaque pays peut bénéficier du libre-échange, à condition de se spécialiser sur la production de biens pour lesquels l’avantage comparatif est le plus élevé, 850 milliards sur 2 500, c’est beaucoup trop ! Nous devons retrouver un modèle de coopération agricole plus vertueux.


F.P. : On dit souvent que c’est « la loi du marché » qui contrôle et déséquilibre le secteur agricole (comme d’autres secteurs d’activité). Est-ce une idée reçue ou le vivez-vous comme une réalité ? Qu’est-ce que cela implique concrètement ?

PG : C’est vrai par moments. Le déséquilibre dans l’offre et la demande contribue souvent à faire monter les prix. Mais cela dépend ce qu’on entend par « loi du marché ». Si on entend par là « loi de la jungle », alors oui… le secteur agricole est soumis à la loi du plus fort. Mais si on entend « loi du marché » au sens de l’organisation d’une concurrence pure et parfaite (censée permettre l’équilibre...

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