Cette gauche qui se passionne (et se déchire) pour la présidentielle américaine
ARTICLE. Marine Tondelier et les écologistes européens d'un côté et Aymeric Caron de l'autre se chiffonnent pour savoir qui de la favorite démocrate Kamala Harris, et de l'écologiste pro-palestinienne Jill Stein, faut-il soutenir face à Donald Trump.
« Un vote pour Harris ou Trump est un vote qui permet le génocide à Gaza. » Cet appel de la candidate écologiste américaine a visiblement été reçu cinq sur cinq par Aymeric Caron, bien qu’il ne lui était pas spécialement adressé. Créditée d’à peine 1 % des intentions de vote dans les sondages, Jill Stein (c’est son nom) n’a aucune chance de remporter l’élection présidentielle. Mais la candidate du Green Party pourrait bien avoir un rôle décisif sur le scrutin du 5 novembre et faire perdre Kamala Harris, au coude à coude avec Donald Trump.
La candidate écologiste de 74 ans avait déjà été accusée d'avoir dispersé l'électorat d'Hillary Clinton au bénéfice de Donald Trump en 2016 en récoltant 1% des voix. Inséparable de son keffieh palestinien, multipliant les discours anti-militaristes, elle n’a pas renoncé à marcher sur les plates-bandes de Kamala Harris, malgré les nombreux appels venus de part et d’autre à gauche, à retirer sa candidature pour ne pas « faire le jeu de Donald Trump ». Il faut dire que les circonvolutions du camp démocrate sur la question palestinienne et le double discours de Kamala Harris – tantôt « nous ne pouvons pas nous permettre d'être insensibles à la souffrance » des gazaouis, tantôt « Je défendrai toujours le droit d'Israël à se défendre » –, en fonction du public auquel elle s’adresse suffisent à en faire un soutien implicite de ce que Jill Stein qualifie elle-même de « génocide ». L’éternel tiraillement entre la pureté idéologique d’un côté et l’épouvantail du chaos de l’autre. Une sorte de cordon sanitaire à l’américaine. Rien de bien dépaysant vu de l’hexagone, où l’on a vu la moindre tête qui dépassait à gauche être décapitée, un coup par la macronie, un coup par la mélenchonie. Un paysage politique et institutionnel différent, mais les mêmes réflexes pavloviens.