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Charles Onana : « Paul Kagame a obtenu tout ce qu’il voulait de la France »

ENTRETIEN. La justice française a clos la semaine dernière le dossier rwandais en confirmant le non-lieu dans l’enquête sur l’attentat qui a déclenché le génocide en 1994. Un dossier pourtant explosif sur lequel toute la lumière n’a pas été faite selon le spécialiste Charles Onana, auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet dont Rwanda, La vérité sur l’opération turquoise (L’Artilleur, 2019) et Enquêtes sur un attentat (L’Artilleur, 2021).

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Front populaire : La décision de justice rendue hier met judiciairement fin aux querelles historiques et diplomatiques autour de l’attentat du 6 avril 1994. À cette date, le Falcon 50 du président rwandais Habyarimana est abattu en plein vol, élément déclencheur du génocide rwandais. Pouvez-vous nous rappeler succinctement les faits ?

Charles Onana : Tout commence effectivement le 6 avril 1994 au matin lorsque les deux chefs d’État du Rwanda et du Burundi se rendent à Das-Es-Salaam, la capitale tanzanienne pour une rencontre officielle. Le chef de l’État rwandais, Juvenal Habyarimana, effectue ce voyage dans son avion Falcon 50 avec l’équipage français. Pendant la réunion, les pilotes français sont très inquiets, car ils ont reçu depuis des mois des informations attestant que les rebelles du Front Patriotique Rwandais (FPR) dirigés à l’époque par l’actuel président du Rwanda Paul Kagame disposent de missiles SA 16 de fabrication russe et qu’ils envisagent d’abattre le Falcon présidentiel.

Face à cette menace, les pilotes français refusent d’effectuer des vols nocturnes pour ne pas exposer le chef de l’État. Constatant que la rencontre s’éternise et que la nuit est sur le point de tomber à Dar-Es-Salaam, ils supplient le protocole du président de rappeler à ce dernier qu’il est nécessaire de rentrer à Kigali au plus tôt pour des raisons de sécurité. L’équipage quitte finalement la capitale tanzanienne en fin de journée et au moment de l’atterrissage vers 20h30 à l’aéroport Kigali, placé sous la protection des Casques bleus de l’ONU, le Falcon 50 est pulvérisé par un missile SA 16. Toutes les personnalités à bord, dont les présidents du Rwanda et du Burundi ainsi que les membres de l’équipage français, sont tuées sur le coup.

À la suite de cet attentat, les veuves des pilotes français saisissent la justice ; le dossier est alors confié...

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