« Couple franco-allemand » : chimère au service de Berlin et Washington
OPINION. À chaque fois que la France essaie de retrouver sa puissance, elle bute sur un obstacle de taille : l’Allemagne. Si bien que tout le monde s’accorde — excepté la classe dirigeante par cécité ou trahison — pour avouer que le couple franco-allemand est une chimère.
Depuis que le général de Gaulle, en 1963, comprit que la RFA ferait toujours passer l’atlantisme avant l’alliance française, il n’y a plus de relation privilégiée entre Paris et Berlin. Comme l’explique Coralie Delaume dans son livre Le couple franco-allemand n’existe pas (Michalon, 2018), la réunification de l’Allemagne, en faisant basculer son centre de gravité vers l’est, aggrava la rupture entre les deux pays. Dès lors, on ne compte plus les manœuvres allemandes contraires aux intérêts français : réarmement par matériel américain et non français, action pour que le nucléaire ne soit pas reconnu par l’Union européenne (UE) comme une énergie renouvelable, affaire de l’avion de combat Scaf, etc. Pour comprendre ces agissements, il faut remonter aux sources de l’unité allemande.
L’identité prussienne de l’Allemagne
L’histoire de l’unité allemande, c’est l’histoire de l’affirmation de la puissance prussienne sur le reste du monde germanique. Tout part d’une vexation : celle infligée par Napoléon lorsqu’il fit perdre à la Prusse, après la paix de Tilsit de 1807, la moitié de son territoire et de sa population. Guillaume I s’en souviendra lors de la guerre de 1870, quand il imposera les conditions de la paix à la France.
L’Allemagne de l’époque haïssait la France pour ce qu’elle était : la patrie de la Révolution. Après la défaite de Iéna (1806) et la fin du congrès de Vienne (1815), les intellectuels allemands développèrent le culte d’une germanité retrouvée en réaction à la France — dont le philosophe Johann Gottlieb Fichte, avec ses Discours à la nation allemande, sera l’une des têtes de proue. S’il est évident que l’union douanière (le Zollverein) participa à la réalisation politique du pays, c’est bien ce mélange de paix économique, de développement industriel et d’un nationalisme tourné contre la France, qui seront à la base de l’unité impériale allemande.
Lorsque Bismarck,...