Emmanuel Macron : le moment plutonien
OPINION. Démocratie malade, immobilisme des institutions… La présidence d’Emmanuel Macron aura au moins eu le mérite de faire apparaître clairement ce qui déjà s’opérait sous nos yeux. Mais pour combien de temps encore ?
De quoi Emmanuel Macron est-il le nom ? Dilution du système partisan, érosion des corps intermédiaires et même corrosion des usages électoraux ? Certains voyaient plutôt le président disruptif. Voici donc ci-après un forage géologico-politique sous la surface macronienne.
Tout commence en 2017. Du moins, un semblant de processus apparaît-il aux yeux des analystes. Ça bouge. Ça brouille aussi. Alors que les « en même temps » jaillissaient, que les sondages s’affolaient, les partis traditionnels, eux, s’enlisaient, voyaient la croûte terrestre d’un peu plus près, les pieds très lourds, enchaînés, enfoncés dans les dernières décennies d’une gestion ni véritablement sociale, ni véritablement démocrate, ni-figue ni-raisin pour tout dire. C’en était fini. L’UMPS disparaissait, remplacée par la fraîche et novatrice figure d’un centrisme de gauche et de droite, deux en un, c’était plus simple.
Néanmoins, sous des dehors libératoires, des habits neufs et propres, une métamorphose politique dévorait du dessous les paysages traditionnels. Les appareils politiques — le visible donc — décanillaient gentiment, et avec eux, une partie des réalités politiques et historiques sous-jacentes à notre démocratie. Survinrent alors les Gilets jaunes — jacquerie fluorescente — puis le « grand débat ». Les deux se répondent l’un l’autre, ils sont inséparables. Une force politique émerge, et hop ! La voilà quelques semaines après, déjà ligotée, bâillonnée, repeinte du nez aux orteils, non par la censure, mais par le verbe présidentiel lui-même. Verbe pour lequel l’Élysée, mais aussi les médias et nombre d’observateurs auront construit et délimité un espace spécifiquement hermétique à la contestation. Vous ne suivez pas ? Il y a d’autres exemples, et voilà en quoi se reconnaît un système neuf : il se réplique, s’installe. La convention citoyenne par exemple. Une inquiétude s’exprime, des manifestations émaillent le pays, et voilà qu’une forme hybride de consultation est instaurée, laissant là aussi au verbe présidentiel le loisir de reformuler, de...