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Le paradoxe de nos gouvernants : « Pour conserver le pouvoir, il faut le limiter »

CONTRIBUTION / OPINION. Pourquoi tous nos présidents depuis cinquante ans sont-ils pro-européens, pourquoi défendent-ils ce transfert de souveraineté nationale qui semble diminuer leur pouvoir ? Notre sens commun nous dit que toute personne en possession d’un pouvoir veut non seulement le conserver, mais surtout l’étendre. Un paradoxe récurrent chez nos gouvernants.

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Hommage de Nicolas Sarkozy à l'ancien chancelier fédéral d'Allemagne, Helmut Kohl, au Parlement européen à Strasbourg le 01/07/17Crédits illustration : © European Union/SIPA


Selon Aristote, la cité est une communauté d’hommes libres. S’il identifie l’homme à un animal politique, c’est parce que, seul parmi les animaux à avoir un langage, il est prédisposé à vivre en communauté. C’est dans la cité, la forme la plus haute de la vie sociale, qu’il pourra atteindre une vie heureuse. Mais si la question du modèle politique se pose avec autant d’insistance depuis vingt-cinq siècles, c’est parce que cette communauté n’est ni immédiate ni absolue. Il y a certes dans l’homme une propension à la vie en société, mais cette dernière doit être organisée, les hommes n’obéissant pas naturellement à une nécessaire autorité. La politique reste l’exercice du pouvoir d’un homme sur un autre homme libre, d’où la question politique : quel pouvoir permet de soumettre des hommes qui, en même temps, doivent rester libres ? L’analyse de notre héritage philosophique permet d’identifier quatre grands modèles pour répondre à cette question.

Le premier modèle est donné par Aristote, pour qui la liberté consiste à participer activement à la vie de la cité, en étant tour à tour gouverné et gouvernant. Cette vision exige une certaine homogénéité sociale et culturelle et une assimilation de l’individu à la cité, ce qui est difficile à réaliser dans nos sociétés modernes.

Le deuxième modèle propose de limiter le pouvoir politique au strict minimum. Puisque la liberté est en opposition évidente avec la soumission du citoyen, il faut limiter les contraintes à leur strict minimum. Selon cette approche, le pouvoir est créé artificiellement par des hommes affamés de puissance, et la société doit pouvoir fonctionner sans, ou avec une emprise minimale. Cette idée libérale, partagée par les cyniques grecs et les anarchistes russes de la fin du XIXe siècle, se retrouve également dans l’idéal de la société marxiste. Une fois le pouvoir pris par...

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