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Oui, il faut réformer l’ENA. Mais comment ?

OPINION. Après avoir annoncé la suppression de l’ENA, Emmanuel Macron préfère finalement se contenter de réformer le processus d’admission. Un projet louable et nécessaire mais qui ne doit pas perdre son objectif final : former une administration efficace et souveraine, au service de la nation.

/2021/03/ENA

L’épidémie a levé le voile. Trente ans de politiques ultra libérales ont sacrifié le service public sur l’autel de la doxa bruxelloise : toujours moins de postes au service de la population (enseignement, hôpitaux, recherche…), mise en place d’une bureaucratie ou d’agences pour compter et rationner les postes, les lits, les classes, régime des flux tendus appliqué aux fournitures et matériel essentiels.

Nous arrivons au bout de l’exercice : on a compromis l’économie française étouffée par un confinement anormalement long mais rendu nécessaire par l’imprévoyance de nos dirigeants et l’insuffisance des structures hospitalières. On a compromis l’avenir de notre jeunesse et accru les inégalités par l’insuffisance de l’encadrement. On a compromis notre souveraineté en clochardisant notre recherche et notre appareil productif. Au nom de l’Union européenne, on a perdu des milliards pour des économies budgétaires illusoires.

Le problème est donc politique. Mais il implique directement ces hauts fonctionnaires peuplant les ministères et les directions, grassement primés pour démanteler l’outil de l’État au profit du marché. Ce personnel est principalement issu de l’ENA (voie externe), c’est-à- dire d’une quasi cooptation sociale à l’intérieur d'une famille idéologique réunie autour du projet de la mondialisation heureuse et de l’Union européenne à n’importe quel prix. Les jurys chaque année se plaignent (hypocritement ?) du conformisme des candidats.

Le plus préoccupant est que, parallèlement, depuis des décennies, l’esprit élitiste infusé au sein de chaque promotion inspire moins le sens du devoir que celui de la recherche de postes pourvoyeurs d’avantages matériels. La caste composée des « premiers de cordée » (sortis les premiers de l’ENA) donne le la à cet égard. La voie interne d’accès à l’ENA ouverte aux fonctionnaires ayant 4 ans de carrière équilibre très imparfaitement les asymétries observées dans les recrutements par la voie externe.

L'école est en question. La supprimer ? Pour quel système ? Celui de l'entre-soi...