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Pierre Lévy : « Le clivage s’approfondit entre les "élites mondialisées" et les classes populaires »

ENTRETIEN. Ancien journaliste à L’Humanité, Pierre Lévy est l’actuel rédacteur en chef de Ruptures, mensuel eurocritique et souverainiste. Nous l’avons interrogé au sujet du duel Macron-Le Pen à venir et la cristallisation autour des thématiques européennes.

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Front populaire : Le retour du duel Macron-Le Pen est-il une surprise pour vous ?

Pierre Lévy : Il confirme en tout cas une tendance lourde qui s’ancre, scrutin après scrutin, dans la réalité politique française, et dont les premiers signes manifestes s’étaient fait jour lors du référendum de 2005 sur le projet de traité constitutionnel européen (mais dont les prémices étaient apparues dès 1992, au moment du référendum sur Maëstricht) : un clivage qui s’approfondit entre ceux qui se rangent derrière les « élites mondialisées », autrement dit autour des classes possédantes ; et les classes populaires. Ce clivage « bloc contre bloc », décrit notamment par le politologue Jérôme Sainte-Marie, n’est pas près de disparaître.

Qu’on s’en réjouisse ou qu’on le déplore, ce « vote de classe » caractérise le premier tour des présidentielles, et devrait polariser le second tour : ce n’est pas pour rien que l’actuel maître de l’Élysée a été étiqueté depuis 2017 comme « le président des riches », un sparadrap qui n’a cessé de lui coller à la peau, tant par le contenu de sa politique que par ses manières arrogantes et méprisantes ; et que les ouvriers et employés – ceux-là mêmes qui sont régulièrement tentés par l’abstention – forment les gros bataillons des électeurs de Marine Le Pen.

On notera que le troisième homme, Jean-Luc Mélenchon, a progressé grâce au renfort de deux catégories. D’une part, les couches urbanisées « éduquées », intellectuels (au sens large) vivant en centre-ville des grandes métropoles, volontiers ouverts à la mondialisation ; et d’autre part, les citoyens – jeunes, bien souvent – issus de l’immigration très représentés dans ce que la langue post-moderne appelle pudiquement « les quartiers ». Mais « quartiers populaires » est une notion qui ne recoupe pas exactement l’appartenance de classe (même s’il y a une corrélation).

Bien sûr, les...

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