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Pierre Mandon : « À quoi sert le référendum si le résultat n’est de toute façon pas respecté ? »

ENTRETIEN. Après avoir soutenu une thèse d’économie politique, Pierre Mandon a souhaité poursuivre ses recherches sur la démocratie directe. Il est l’auteur d’une vaste étude des conditions de possibilité et d’exercice de la démocratie directe : La démocratie directe contre la sécession des élites, aux éditions Perspectives Libres. Deuxième partie de notre entretien.

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Front Populaire : La démocratie directe en France existe déjà par deux biais que vous exposez dans le livre. Quels sont-ils et pourquoi sont-ils si peu utilisés ?

Pierre Mandon : Depuis l’instauration de la Ve République le 4 octobre 1958, il n’existe que deux instruments de démocratie directe au niveau national : un référendum obligatoire restreint aux parlementaires, inscrit dans l’article 89 de la Constitution, qui n’a jamais eu à être appliqué ; et surtout un référendum plébiscitaire, inscrit dans les articles 11 et 89 de la Constitution, pouvant être initié par le chef de l’État, soit le président de la République. Je mets de côté le référendum dit « d’initiative partagée » sous-entendu entre les parlementaires et le corps électoral, prévu par la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008, en vigueur depuis le 1er janvier 2015 et inscrit dans l’article 11 de la Constitution qui est une usine à gaz comme le démontre l’affaire de la privatisation (avortée pour le moment) des aéroports de Paris.

Sous de Gaulle, entre 1958 et 1969, on a compté cinq référendums plébiscitaires, soit autant que depuis 1969. Le dernier date de 2005 et aucun référendum plébiscitaire n’a eu lieu depuis, même s’il se murmure qu’Emmanuel Macron pourrait y faire appel. Le Général de Gaulle concevait le référendum plébiscitaire comme le moyen de rendre compte des actions du président directement aux Français, lui donnant ainsi la légitimité de sa souveraineté. À mon avis, il est peu utilisé (depuis 1969) pour deux raisons : la démission de de Gaulle en 1969 montre que la responsabilité du chef de l’État est moralement engagée lors d’un référendum plébiscitaire ce qui a calmé quelques ardeurs, et le référendum de 2005 (aboutissant au refus majoritaire pour une constitution européenne) a démontré un déni flagrant de démocratie qui a fini de refroidir les successeurs...

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