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Sahra Wagenknecht ou le socialisme patriotique

L’enfant politique de Jaurès et de Gaulle existe. C’est une femme… allemande ! Depuis plusieurs années, Sahra Wagenknecht monte en puissance outre-Rhin sur une ligne à la fois sociale et patriote. Revendiquant lui aussi ce double héritage, Georges Kuzmanovic nous présente son cursus et ses idées politiques.

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Dans une Europe en perte de repères, bousculée par les crises économiques, les tensions géopolitiques, l’effondrement des partis traditionnels et la montée de la défiance populaire envers les élites, Sahra Wagenknecht s’impose comme une figure singulière. Ancienne égérie du parti Die Linke – dont elle fut vice-présidente jusqu’en 2015 et co-présidente du groupe parlementaire au Bundestag de 2015 à 2019 –, elle a fondé en janvier 2024 son parti, Bündnis Sahra Wagenknecht (BSW) – Für Vernunft und Gerechtigkeit (Alliance Sahra Wagenknecht – Pour la raison et la justice), et ambitionne d’occuper un espace politique inexploité jusqu’alors en Allemagne, avec la volonté de rassembler les déçus de la gauche, les sceptiques de l’Union européenne, les pacifistes anti-atlantistes et les patriotes sociaux. Face au clivage dominant entre une gauche culturelle hors-sol et une droite autoritaire identitaire, elle propose un socialisme patriotique, enraciné dans l’histoire du mouvement ouvrier européen. Wagenknecht revendique une gauche qui parle au peuple sans mépris, qui réconcilie justice sociale, souveraineté nationale, paix internationale et rationalité économique, sans tomber dans les travers de la majorité de la gauche européenne rongée par l’idéologie woke venue des États-Unis. Elle refuse le cosmopolitisme libéral autant que le nationalisme réactionnaire. Elle incarne une troisième voie cohérente, mais largement orpheline en Europe occidentale. Le BSW combine des revendications sociales proches de celles de la gauche (régulation du marché, redistribution, renforcement de l’État-providence) avec des positions conservatrices sur l’immigration, la sécurité et les questions de société. C’est un positionnement inédit dans le paysage partisan allemand, qu’aucune formation n’avait jusqu’ici clairement adopté, et une combinaison potentiellement majoritaire en Allemagne (comme en France), à même de fédérer largement une fois le seuil politique critique atteint – ce qui n’est pas encore le cas de son parti, le BSW, qui a engrangé d’importants succès lors des élections dans les...

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