La cabine téléphonique
CHRONIQUE. On connait tous une cabine téléphonique près de chez nous. Vestige technologique désafecté et dépassé, mais aussi relique de jours plus doux, immortalisés dans l'imaginaire cinématographique. Tout au long de l'été, notre camarade Jean-Paul Pelras nous incite, avec ces chroniques champêtres, à nous replonger dans ce flot de souvenirs qui font notre identité collective. Car pour des lendemains qui chantent, il faut savoir se souvenir d'hier.
Le soir tombe. Vous revenez de la plage ou de randonnée. Et vous êtes le quinzième à attendre votre tour, une serviette sur les épaules, dans cette file d’attente qui ne cesse de s’allonger devant la cabine téléphonique.
Bien sûr, il s’agit désormais d’une anecdote historique, d’un cliché suranné, d’un vieux souvenir de jeunesse, puisque la fréquentation de ces 290 000 édicules posés sur le trottoir d’en face a progressivement disparu avec l’utilisation du téléphone portable. L’usage de ce « service public » s’avérant peu rentable du moins au-dessous de cinq minutes d’utilisation par jour.
"Seule, très seule, la guérite vitrée d’une cabine téléphonique se dresse sur la placette, lueur dans la nuit."
C’est en 1885 que les cabines téléphoniques font leur apparition à la Bourse de Paris. Des quartiers les plus chics de la capitale au plus petit hameau de province, elles seront ensuite utilisées à tout moment à titre professionnel ou privé par les jacassins de service et les amants inconsolables. Au même titre que la DS et la gabardine, elles feront, dans les années 60, sous le cocon des lampadaires et dans leur lumière d’aquarium, le bonheur des cinéastes qui l’utiliseront pour abriter des situations tour à tour cocasses ou dramatiques.
Sans ménagement pour le malheureux combiné, les vedettes du moment, une clope au bec, nous y feront vivre en direct quelques braquages historiques et l’agonie programmée d’une bordée d’adultères.
Mais citons pour terminer Jean-Pierre Chabrol qui écrit dans ses rebelles « Tout autour dans la vallée, il y avait des moulins, une filature, des mines, des vignes, des châtaigneraies. Il n’en reste rien. Seule, très seule, la guérite vitrée d’une cabine téléphonique se dresse sur la placette, lueur dans la nuit. »