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La lumière sous la porte
CHRONIQUE. Tout au long de l'été, notre camarade Jean-Paul Pelras nous incite, avec ces chroniques champêtres, à nous replonger dans ce flot de souvenirs qui font notre identité collective. Aujourd'hui, un trait lumineux...
Ce n’était pas grand-chose finalement. Non, juste un trait qui nous séparait du monde des adultes, de leurs distractions tardives, de leurs confidences et du générique des « Dossiers de l’écran ».
Nous avions entre 4 et 8 ans et nous étions attentifs au moindre craquement, au moindre bruit de pas, au souffle du vent qui passait par la lucarne du grenier, à l’aboiement inhabituel. Un édredon, un crucifix, la grande armoire, les nœuds du bois dans le lambris qui dessinaient des masques inquiétants, les motifs inoubliables du papier peint.
L’oncle qui se déchausse devant la Rosière, le bruit de la chasse d’eau, celui des bols que la tante pose sur la table en formica pour le lendemain. Cette vache, de l’autre côté de la cloison, qui devait faire le veau dans la nuit. L’odeur de bouse, de foin et de lait suri qui est partout et que l’on retrouvait avec bonheur sur nos habits en ouvrant la valise une fois les vacances fines.
La prière en patois dans la chambre voisine. Toujours les mêmes mots échangés sur l’oreiller aux portes du sommeil pour conjurer le sort à l’heure des récoltes et des maladies. Et puis d’un seul coup, cet interrupteur qui claque dans le couloir, ce faisceau qui disparait dans la nuit. On cherche la bouillote ou la brique sous le pied. Et l’on s’endort en se disant que le lendemain, derrière les murs de granit, avec Marie-Laure, nous arriverons enfin à faire décoller le grand cerf-volant.
Et l’on s’endort en espérant que Jean Chastel a bien tué la Bête du Gévaudan.
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