Ça y est : des chars allemands, appelés « Leopard », vont être livrés à l’Ukraine. Il y aura aussi des chars américains, anglais et peut-être français, les « Leclerc ». Est-ce légitime ? Est-ce nécessaire ? Est-ce dangereux ? Les questions se posent, et après de fortes hésitations — pas chez tous —, l’Allemagne, par la voix du chancelier social-démocrate Olaf Scholz, accepte finalement de livrer, et accorde aux pays qui en possèdent le droit de livrer, des chars Leopard. On apprend au passage que nombre de pays européens possèdent de tels chars et que l’Allemagne est redevenue une puissance militaire, cherchant même ouvertement à devenir la première en Europe.

Cette livraison de chars Léopard permettra à l’Ukraine — dit-on — de briser les lignes russes, de bouter l’envahisseur hors du territoire ukrainien. Il est incontestable que la Russie a commencé à envahir l’Ukraine le 24 février 2022, que les dirigeants russes — Vladimir Poutine le premier — ont choisi la guerre. Est-il pour autant interdit de s’interroger sur les décisions prises par les dirigeants européens, d’examiner et de mesurer ce qui est en train de se passer ?

L’histoire devrait pouvoir éclairer notre lanterne : elle a pour elle la profondeur de vue. On entend pourtant fort peu les historiens sur le sujet de la guerre en Ukraine. Le point de vue que nous souhaiterions développer se situe à la jonction de l’histoire et du symbolique ; car si l’histoire relève pour une part de forces matérielles, elle dépend aussi de structures symboliques qui l’organisent et la déterminent. Ces structures sont nombreuses, mais la première est celle du langage, se manifestant dans le discours. Or, à suivre les éléments des discours prononcés, véhiculés, lors de cette guerre, certains aspects étonnent.

Commençons par le surgissement de cet hymne aux chars allemands, « les meilleurs du monde ». Nous n’en doutons pas....