Éoliennes en mer : on a volé mon horizon
OPINION. Résidant devant le parc de Fécamp (Seine maritime), notre lectrice regrette que la préservation de la beauté des paysages soit si peu invoquée dans le débat sur l’éolien.
Je suis partie, l’âme en fête et le cœur chantant, retrouver enfin cette mer qui me manque tellement, lorsque je suis au milieu de mes forêts jurassiennes. Ma vieille voiture (à essence) jubilait, elle aussi, aux approches de la côte normande, car le climat lui plaît bien davantage que la chaleur continentale. Je l’ai posée au frais, dans le jardin, et j’ai foncé vers ma petite plage, pressée de retrouver mon horizon de mer, immuable et familier, entre ces deux immenses falaises dont l’une a porté autrefois, avant la guerre, la maison familiale, dynamitée en 1942.
Ce que j’ai découvert en arrivant sur les galets m’a coupé le souffle, et mise dans une rage froide. Je savais, pour m’être battue en vain contre un envahissement inique et tellement injustifié (mais ma plage n’est pas celle du Touquet…) que 71 éoliennes seraient montées au large avant peu. Là, sous mes yeux, sur l’horizon défloré, se découpait une gigantesque machine clignotant comme un monstrueux arbre de Noël. Et de la mer, surgissaient des myriades de tuyaux, futurs porteurs des mâts, puis des pales géantes.
On m’avait dit : « Elles seront à 12 km, tu les verras à peine ! » À peine ? Ces mâts mesurent 105 m, les éoliennes, 178 m en totalité. Presque deux fois mes belles falaises. Invisibles ? C’est une plaisanterie ? Fini, cet horizon de mer, vierge et séculaire, juste coupé parfois par une voile vagabonde. Finis, les sublimes couchers de soleil. Finies, les soirées calmes et sombres, puisque les 71 lumières rouges clignotantes auront chassé le mystère et la paix.
Tout ce coûteux massacre environnemental pour une énergie « intermittente » et parfaitement aléatoire, un rendement moyen de 25 % dans le meilleur des cas, lorsque le vent n’est ni trop fort ni trop faible. Quel scandale ! Après que mes falaises aient été truffées...