C’est en fait d’abord le philosophe Johann Gottfried von Herder qui développa l’idée du Volksgeist dans un ouvrage publié en 1774. Or, comme l’expliquent Pierre Dulau, Guillaume Morano et Martin Steffens dans leur Dictionnaire paradoxal de la philosophie. Penser la contradiction (Cerf) : « si [Herder] ne renonce pas à l’horizon universel de l’humanité, dont les nations singulières ne sont que des réalisations spécifiques, chacune d’elles se définit bien par son génie propre, composée par son langage et sa vie culturelle ».

Dans les Principes de la philosophie du droit, Hegel indique aussi que les peuples ont une destinée à caractère universel puisque, comme l’explique le philosophe Stéphane Mosès dans L’Éros et la loi (Seuil) : « Les différents esprits nationaux (ou “esprits des peuples”) se tiennent autour du trône de “l’Esprit universel” (Weltgeist) comme les agents de sa réalisation. » Ou, comme l’écrit encore Jean Hyppolite dans son Introduction à la philosophie du droit de Hegel : « L’humanité ne se réalise que dans les peuples divers qui expriment à leur façon, qui est unique, son caractère universel. »

Il est donc important de souligner que dans notre texte, seul nous importe le fait qui consiste à reconnaître à chaque peuple un caractère singulier, c’est-à-dire doté « d’un principe spirituel qui gouverne son destin », tel que l’appelle Stéphane Mosès.

Peut-être faut-il alors comprendre que ces « esprits des peuples » sont à appréhender lorsque de forts flux migratoires importent leurs propres valeurs dans un pays hôte. Selon nous, l’« esprit d’un peuple » prend corps dans ses valeurs culturelles en général et j’ajouterais même dans ses instincts (avec l’idée du déterminisme que cela implique). Dès lors, connaître le caractère d’un peuple qui vient s’installer sur son sol, comme on désire connaître le caractère de son prochain voisin de palier pour savoir si l’on va s’entendre avec lui, est un...