PhilosophieIntelligence artificielle

Intelligence artificielle : Enthoven, Mozart et la reine Didon

CONTRIBUTION / OPINION. Encore heureux ! Le philosophe Raphaël Enthoven a remporté son duel contre le logiciel conversationnel Chat GPT sur l'épreuve de philosophie du baccalauréat. Mais outre le résultat, cette expérience en apparence anodine n'est pas sans intérêt.

/2023/06/Enthoven-Mozart-ChatGPT


Raphaël Enthoven a obtenu une meilleure note à l’épreuve de philosophie du baccalauréat 2023 que ChatGPT, paramétré au plus serré… Encore heureux ! Le contraire aurait sacrément entamé la motivation des futurs candidats à Normal Sup ou à l’agrégation !

Mais il ne faut pas moquer cette excellente nouvelle. Si l’Intelligence artificielle est capable de rédiger une dissertation en 1 min 30 s, d’effectuer instantanément des recherches de troisième cycle, de construire des mémoires et des thèses, à l’évidence, elle demeure un outil sans âme, ni intuition, ni style, ni génie.

Si cette technologie peut produire des discours politiques aussi argumentés, efficaces et équilibrés que ceux des élus ou de leurs conseillers, le problème ne vient peut-être pas seulement de la qualité de la machine…

Si l’IA a la capacité de mettre en forme un roman ou même un poème, d’y fourrer toutes les figures de style enregistrées, tous les procédés littéraires et de disposer de l’intégralité du dictionnaire, il n’est pas certain qu’elle puisse faire naître des émotions qui vous accompagneront des années ou des associations bouleversantes qui tireront des larmes. Même en imposant « albatros, équipage, ailes, géant, marcher » au logiciel, le résultat n’est pas gagné…

Mais, s’il semble que l’IA puisse toujours « exprimer » tout ce que l’informaticien lui ordonne, dans tous les domaines.  Si l’IA se mettait à composer de la musique. Un concerto exceptionnel pour clarinette, par exemple, qui égalerait ceux de Mozart. Une chose est irréalisable, comme l’écrivait Sacha Guitry : « Lorsqu’on vient d’entendre un morceau de Mozart, le silence qui lui succède est encore de lui. » Le silence… le temps suspendu… les secondes sans respiration, la poitrine gonflée… Ce je-ne-sais-quoi de sublime.

D’ailleurs, au Ier siècle, dans son Traité du sublime, le « Pseudo-Longin » évoque le moment où Ajax ne daigne pas répondre à Ulysse : « C’est pourquoi nous...

Vous aimerez aussi