On pourrait croire qu’en assistant aux débats politiques à la télévision, on enrichirait notre vision du monde qui se fait ou qui se profile à l’horizon. Détrompons-nous ! Il s’agit uniquement de télévision, c’est à dire d’un médium qui s’autoproclame, sûr de son impact, anesthésiant toute réflexion personnelle.

En effet, la télévision est un média « chaud » qui convoque avant tout nos sens et notre sensibilité : l’image est prégnante ainsi que le son, vite éparpillé par son phrasé, en rupture, discontinu, un pointillé verbeux, voué à toucher son but, sans coup férir. Il est très difficile de se concentrer sur une réflexion dense, argumentée et nuancée, tant notre attention se trouve captée par un flux imagé, détournant notre intérêt, pressé d’en « venir aux faits ». Aucun débatteur ne peut ainsi se risquer à lire un texte un tant soit peu structuré, sachant qu’il ne sera pas entendu.

Nous savons que les images, sur nos écrans, en mimant la réalité présente, nous distraient d’un jugement abstrait, plus intériorisé et personnel, à propos du sujet traité. Nous devenons captifs de cet effet de réel pris sur le vif et le commentaire qui l’accompagne renforce l’impression de véracité par sa couleur de sincérité non préméditée.

Ce qui se déroule devant nos yeux semble plus crédible qu’un écrit approfondi et cependant moins entaché d’improvisations ou de certitudes à l’emporte-pièce. Car, dans ces soi-disant débats, il s’agit de frapper vite et juste afin d’atteindre sa cible, c’est à dire rapidement délégitimer son adversaire par la formule assassine, l’enfermant dans sa case à double tour. C’est alors une insulte à moindres frais, une psychologie inadéquate, ou bien une allusion à son passé ou à son intimité la plus privée. Nous sommes loin de l’échange respectueux, s’appuyant sur une argumentation et recherchant la vérité, certes provisoire, mais nécessaire afin d’étalonner...