Pour un protectionnisme assumé
Il convient, dans une démarche réellement écologique et sociale, de mettre un terme au libre-échange, ce qui n’implique pas pour autant une autarcie comme les thuriféraires libéraux voudraient le faire croire.
Au cours de mes études à Sciences Po, les leçons d’économie demeuraient l’un des rares espaces où il était possible de débattre du bien fondé de mesures de politiques publiques en fonction de l’école de pensée que l’on favorisait. Les classiques étaient présentés, et leurs contrebalancées avec l’intérêt accru actuel pour les plans de relance keynésiens. Cette diversité d’opinions valables, qui faisait tout l’intérêt des leçons d’économie, trouvait à s’appliquer à toutes les thématiques sauf une : le commerce international. A ce sujet, le « TINA » (there is no alternative) thatchérien était de rigueur : la croissance économique ne pouvait se réaliser sans une abolition des barrières au libre-échange des biens et des services. Les théories critiques du libre-échange étaient ainsi dans le meilleur des cas simplement mentionnées pour en réfuter le bien fondé. Ce manichéisme universitaire était le produit d’un consensus mou chez les décideurs depuis plusieurs décennies, qui avaient des yeux de Chimène pour le prétendu doux commerce de Montesquieu au risque de ne pas saisir les facettes moins reluisantes de la mondialisation des échanges.
En France, des barrières commerciales étaient pourtant en place bien avant l’époque moderne, le tarif douanier instauré en 1667 par Colbert permettant par exemple de protéger l'industrie textile française contre la concurrence hollandaise. Le débat sur la régulation des échanges fut amorcé par les travaux de l’anglais Adam Smith, qui préludaient le traité Eden-Rayneval (1786), étendard de la pensée physiocrate réduisant les droits de douane et les prohibitions commerciales entre la France et l’Angleterre. Cette dernière, plus avancée technologiquement que la France, put exporter massivement des produits manufacturés de bonne qualité et à faibles coûts vers le continent au détriment du tissu industriel hexagonal et de la balance commerciale française, autrefois excédentaire. Ce balbutiement libéral fut rapidement arrêté par la période révolutionnaire, la Convention...