Réforme des retraites : La France est-elle au bord d’une révolte ?
CONTRIBUTION/OPINION. Revendications brûlantes, confrontations exacerbées et société en ébullition… Les manifestations contre la réforme des retraites ont-elles franchi un point de non-retour ?
Après le recours du gouvernement au 49 al. 3 pour l’adoption de la réforme des retraites, partout des mobilisations spontanées ont éclaté avec des effigies brûlées, des préfectures prises pour cible, le blocage d’axes routiers et des affrontements avec la police. Face à la violence d’État, le recours à la violence est souvent la seule arme dont disposent ceux qui sont dominés. Quand les institutions ne fonctionnent plus puisqu’elles n’obligent plus le gouvernement à tenir compte de la colère du peuple, alors le conflit frontal n’est jamais loin. Au-delà de l’affrontement social, il faut s’intéresser aux causes de cette situation si tragique pour la France.
La violence d’une société malade
Commencée vers 1800 en Europe occidentale, la révolution industrielle est la troisième révolution technologique que l’espèce humaine ait connue. Comme l’écrit Jean Vioulac, chaque révolution engendre une « reconfiguration de l’existence humaine ». Une des conséquences de la révolution industrielle, et demain digitale, concerne la dégénérescence de la structure de l’État (inquisition morale, surveillance généralisée, contrainte sur les corps). Ces dérèglements ont une explication : la destruction des institutions qui structuraient les sociétés depuis le néolithique.
L’anthropologue Pierre Legendre affirmait que l’axiome de l’État, en France, représentait cet « immémorial qui tient les sociétés, sans lequel il n’est pas de mémoire ». C’est la décomposition de cette Référence qui provoqua la crise institutionnelle symbolisée par le franchissement des interdits, le risque d’anomie et le développement de la violence. Lorsque les fondements d’une société sont ébranlés, la perte des repères fondateurs entraîne un affaiblissement de la responsabilité citoyenne ainsi qu’une diminution des liens affectifs et moraux entre citoyens. Très vite l’anomie sociale dégrade les rapports entre l’individu et la communauté, et le psychologue Alexandre Dorna notait que cette manifestation « spectaculaire et inattendue » de la violence fait vaciller la paix civile.
Comme nous l’avions remarqué...