Littérature

Relire Chateaubriand pour éclairer notre époque

OPINION. Dans ses Mémoires d’outre-tombe, chef-d'œuvre à la fois autobiographique et tableau historique, l’écrivain et homme politique éclaire notre présent à travers un témoignage du passé. Le tout sublimé par une qualité littéraire hors-norme.

/2021/08/CHATEAUBRIAND

L’été est propice à la relecture des œuvres classiques. Je me suis replongé récemment dans les Mémoires d’outre-tombe de François-René de Chateaubriand. Au-delà de la beauté de la langue et des qualités littéraires, au-delà du témoignage historique de cet homme né en 1768 et dont l’oncle lui racontait sa participation à la bataille de Fontenoy (1745) sous Louis XV — a-t-on encore le droit d’écrire « XV » ? Ne doit-on pas maintenant écrire Louis 15 ? — ; qui a rencontré Louis XVI lors d’une partie de chasse mémorable ; a rencontré Napoléon ; a servi Louis XVIII et Charles X et qui meurt en 1848, 6 mois avant l’élection de Louis-Napoléon Bonaparte, j’ai trouvé ces quelques passages tirés, donc, des Mémoires d’outre-tombe (Livres I à XII, Le Livre de Poche, classiques de poche, Paris 1989) qui résonnent étrangement à notre époque.

Écrit en 1821, ce passage relate les évènements de l’époque pré-1789 : « À cette époque tout était dérangé dans les esprits et dans les mœurs, symptôme d’une révolution prochaine. Les magistrats rougissaient de porter la robe et tournaient en moquerie la gravité de leurs pères. Les Lamoignon, les Molé, les Séguier, les d’Aguesseau voulaient combattre et ne voulaient plus juger. Les présidentes, cessant d’être de vénérables mères de famille, sortaient de leurs sombres hôtels pour devenir femmes à brillantes aventures. Le prêtre, en chaire, évitait le nom de Jésus-Christ et ne parlait que du législateur des chrétiens ; les ministres tombaient les uns sur les autres, le pouvoir glissait de toutes les mains. Le suprême bon ton était d’être Américain à la ville, Anglais à la cour, Prussien à l’armée, d’être tout, excepté Français. Ce que l’on faisait, ce que l’on disait, n’était qu’une suite d’inconséquences. On prétendait garder des abbés commendataires et l’on ne voulait point de religion ; nul ne...

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