Frédéric Rouvillois : « Il ne s’agit pas de modifier en profondeur, mais de multiplier les micros-réformes superficielles, à la mode »
ENTRETIEN.La réforme des institutions, vieux projet du candidat Macron en 2017 déjà, semble aujourd’hui regagner la feuille de route d’une majorité encore empêtrée dans sa réforme des retraites. Que faut-il savoir, et que peut-on en penser ? Réponses avec Frédéric Rouvillois, professeur de droit constitutionnel à l’Université Paris Cité et délégué général de la Fondation du Pont Neuf.
Front Populaire : Retour au septennat, décorrélation des calendriers électoraux, réduction du nombre de parlementaires… Les pistes envisagées par Renaissance pour son projet réforme des institutions sont nombreuses. Vont-elles dans le bon sens, selon vous ?
Frédéric Rouvillois : À cette question, il faudrait d’abord répondre par une autre : bon ou mauvais, vont-elles dans un sens déterminé ? Ont-elles été pensées en fonction d’un but patiemment médité et dont la réalisation, indispensable, leur donnerait une cohérence forte ? En somme, à l’arrière-plan, il y a la question lancinante du « pourquoi ? ». Pourquoi une telle réforme ?
En matière d’institutions, lorsque que l’on entreprend de changer les choses, de les changer en profondeur, c’est parfois, bien sûr, parce que cela paraît indispensable : tel est le cas en 1958, lorsque l’on décide de passer à la Ve République, les institutions mises en place par la constitution de 1946 s’étant avérées pratiquement catastrophiques, incapables de permettre à la France de tenir son rang et à l’État de proposer une réponse plausible à la crise algérienne.
Tel est également le cas en 1962, lorsque de Gaulle explique aux Français que le président de la République, s’il veut à l’avenir pouvoir jouer son rôle, doit disposer d’une légitimité forte, et pour cette raison, être élu au suffrage universel direct. Vous notez qu’à chaque fois, les choses sont assez simples : on sait où est le problème, et comment le résoudre. De fait, dans les deux cas, malgré l’opposition furieuse d’une grande partie de la classe politique, le peuple français, consulté par référendum, répond très massivement par l’affirmative.
En revanche, il y a des cas où la révision constitutionnelle n’a d’autre but que de dissimuler quelque chose (songeons à la révision de mars 2005 précédant la ratification du Traité sur la constitution européenne), ou de permettre à son initiateur de se...