Jérôme Sainte-Marie : « La fin du « plafond de verre » est désormais une évidence »
ENTRETIEN. Un an après l’élection présidentielle de 2022, et alors qu’à la faveur des mobilisations contre la réforme des retraites, les fractures politiques et sociales au sein de la société françaises apparaissent plus nettement que jamais, plusieurs sondages montrent que les lignes dans l’opinion publique ont bougé. Quels enseignements en tirer ? Analyse avec Jérôme Sainte-Marie, politologue et fondateur de PollingVox.
Front Populaire : D’après l’institut Elabe, si l’élection présidentielle de 2022 devait se tenir en avril 2023, Emmanuel Macron remporterait 23% des suffrages, au lieu des 27,85% qu’il a récoltés l’année dernière. Jean-Luc Mélenchon perdrait quant à lui 3,5 points, et Marine Le Pen en gagnerait un peu moins de 8… Que disent ses résultats de l’état actuel des blocs populaire et élitaire ?
Jérôme Sainte-Marie : Le premier enseignement est que la crise politique actuelle, avec un président sans majorité parlementaire, ne signifie pas le retour de l’ancien clivage. L’offre symétrique de Jean-Luc Mélenchon et d’Éric Zemmour, pariant sur une réhabilitation en reflet de la gauche et de la droite, ne change pas la donne. Les deux candidats qualifiés pour le second tour seraient dans les hypothèses les plus crédibles un représentant du progressisme contre celui, ou plutôt celle, du souverainisme intégral.
Ensuite, la structure du vote se modifie à la marge. D’un côté, un sur-vote pour Emmanuel Macron du côté les retraités, de l’autre pour Le Pen chez les ouvriers et employés. La nouveauté, c’est l’effritement du vote Macron chez les cadres, catégorie de l’INSEE qui comprend pour plus des trois quarts des cadres du privé. Tout cadres qu’ils soient, ils sont aussi des salariés, et ils ne vivent pas toujours très bien la perspective de travailler, ou de chercher à travailler, jusqu’à 64 ans. Au second tour, Macron l’emporte de peu dans ces deux piliers de sa réussite électorale depuis son entrée en campagne en 2016. Pour Marine Le Pen, son résultat explose chez les actifs – 59% au second tour – et plus encore parmi les employés – les deux tiers de ceux qui voteraient la choisiraient – et les ouvriers, pour les trois quarts d’entre eux. Qu’il s’agisse du niveau de diplôme ou du lieu de résidence,...