Clavel (Maurice)
Passé de Maurras à B.-H.L. en passant par Mao et de Gaulle, Maurice Clavel (1920-1979) aura été constant dans l’errance. La postérité a vu en lui le père spirituel des Nouveaux Philosophes.
« Messieurs les censeurs, bonsoir !  » Lâchée en décembre 1971, au cours d’un débat (qui n’a pas eu lieu) avec le ministre Jean Royer, la petite phrase symbolise à elle seule l’ambiance de joyeux chahut qui règne après 1968. En direct à l’ORTF, son auteur, Maurice Clavel, se plaint du traitement réservé à son reportage Le Soulèvement de la vie, amputé d’un mot, « aversion », censé définir les sentiments du Président Pompidou à l’égard de la Résistance. Quittant le plateau sous les applaudissements, le philosophe normalien venait d’offrir à l’audiovisuel français jusque-là sous contrôle l’un de ses premiers moments cultes.
De Maurras à B-H. L en passant par Mao
Militant du PPF de Jacques Doriot avant la guerre, fonctionnaire de Vichy puis chef du maquis d’Eure-et-Loir, gaulliste enflammé pendant la traversée du désert, journaliste « maorrassien » au Nouvel Obs en pleine ébullition soixante-huitarde, avant de devenir le grand frère des Nouveaux Philosophes, tel est le sinueux parcours de Maurice Clavel, celui d’un « journaliste transcendantal » (selon sa propre expression), d’un anticonformiste pas tout à fait insensible aux modes du moment. Quelques constantes, néanmoins : vomir les bien-pensants, choquer le bourgeois et perpétuer un certain esprit de révolte. À la Libération, il a une pensée pour ceux sur le point de passer à l’échafaud, et plaide la cause de Robert Brasillach (sans succès) et de Pierre Drieu La Rochelle – qui se suicide avant le début des ennuis judiciaires. Au milieu des années 60, il retourne à la foi, tout en s’éloignant du gaullisme ; surtout du gaullisme des barons et des notoires. À Emmanuel d’Astier de La Vigerie qui se rend chez Pompidou, il fait ce reproche : « Ce n’est pas moi qui refuserais à quiconque d’être gaulliste, et de gauche. Mais il est inconcevable qu’un homme de gauche gaulliste aille, si peu que ce soit,...