Front Populaire : Dans votre roman Jaune, sorti l’année dernière, vous dépeignez une France déclassée, oubliée, laissée de côté par les médias et les décideurs politiques, exclue de la mondialisation, une France des usines fermées et des services publics en ruine. Bref, la France “périphérique”. Dans quelle mesure ce tableau apocalyptique correspond-il à la réalité ?

Éric Desmons : Mon roman n’est pas le fruit d’une enquête de terrain, mais de prises vues dans mon quotidien, à la campagne, dans cette France dite « périphérique ». Il s’agit d’un travail de fiction, mais à l’exception des ressorts narratifs du polar, tout ce qui s’y déroule est vrai. C’est-à-dire que toutes les situations que rencontrent mes personnages sont des situations que j'ai vécues soit à titre de témoin, soit à titre de militant. J’évoque par exemple dans Jaune la fermeture d’un EHPAD public, et j'ai moi-même été à la tête d'un collectif de familles contre la fermeture d'un établissement de ce genre.

Je vis dans une zone rurale, dans un territoire qui est assez délaissé, par la force publique comme par les opportunités économiques. Je rencontre beaucoup de gens et je vis là depuis toujours, en vérité. Ce que je décris, c'est ce que j'ai...