France Inter, lundi 3 avril 2023. Au micro de Sonia Devillers, on sent l’interviewé au bord de la rupture. Son discours se fait même victimaire. Extrait in extenso : « Je n’ai pas choisi d’être un homme, je n’ai pas choisi d’être blanc. Je n’ai pas choisi de désirer les femmes. Comme je n’ai pas non plus décidé de naître dans les années 1960 à une période de libération sexuelle dont j’ai pu également souffrir, comme beaucoup de gens de ma génération. C’est ennuyeux quand on est défini, et même critiqué pour des choses sur lesquelles on n’a pas eu de contrôle. Je veux bien être critiqué sur mes livres, mes films, mes articles de journaux, mais pas sur mon être. »Celui qui s’exprime ainsi est Frédéric Beigbeder, plus connu pour son ironie et son dandysme parisien que pour l’auto-atermoiement façon bobo. Interview très significative de l’époque et du monde post-MeToo.

Mouvement woke en embuscade

Publiant chez Albin Michel un nouvel ouvrage, Confessions d’un hétérosexuel légèrement dépassé, celui qui pense que, désormais, « pour être entendu, il faut être une victime, parce que nous sommes dans un mode de compétition victimaire » ne fait pas que le portrait qu’on peut juger inutile, déplacé ou hors de propos d’un homme de plus de 50 ans devant s’excuser d’être blanc, bourgeois et hétéro face à un mouvement woke en embuscade. Ce discours, qui sert bien souvent de faux-nez à la banalisation des idées réac, prend ici une autre dimension du fait du CV de son auteur. Certes issu d’un milieu bourgeois qu’il a toujours assumé, mais biberonné à la contre-culture — en particulier le nouveau journalisme de Tom Wolfe ou Hunter Thompson et leurs pendants français, Yves Adrien ou Alain Pacadis — et à la littérature tendance trash — façon Bret Easton Ellis, qu’il...