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Guillaume Travers : « Les cadeaux de noël n’ont plus aucune signification traditionnelle »
ENTRETIEN. Professeur d’économie, Guillaume Travers est également versé dans les sciences sociales. Dans Capitalisme moderne et société de marché (2020), il essaye d’analyser, dans le développement du capitalisme, le déploiement concomitant du règne de la quantité.
Front Populaire : Vous expliquez dans votre ouvrage que l’explosion du marché de la revente de cadeaux de noël est un bon exemple de la marchandisation du monde. En quoi cette démarche est-elle significative ?
Guillaume Travers : C’est un exemple parmi des centaines d’autres, mais il est très significatif. Dans les sociétés prémodernes, la majorité des biens ne sont pas de pures marchandises, valorisées en fonction de l’offre et de la demande. La circulation des biens, les relations des hommes aux choses, sont entourées d’un grand nombre de rites, de symboles, qui donnent du sens aux échanges. Pour reprendre l’exemple ci-dessus, un cadeau de Noël n’était donc pas interchangeable avec d’autres. C’était un bien dont on gardait le souvenir qu’il avait été reçu de telle personne, dans telles ou telles circonstances, ce qui lui conférait un caractère qualitatif particulier, un sens. À l’heure de la revente des cadeaux de Noël, tout cela est terminé : le cadeau n’est plus qu’un bien, convertible en une quantité d’argent auprès de n’importe quel inconnu. Autrement dit, une marchandise. Les significations traditionnelles se sont évanouies. Ce processus de transformation du monde en marchandise, qui a affecté historiquement un grand nombre de biens, est au cœur du capitalisme : tout ne doit valoir qu’en fonction de l’offre et de la demande, en fonction du prix.
FP : Vous considérez que le capitalisme a progressivement vampirisé tous les champs de la vie sociale. Diriez-vous que notre être social a été reprogrammé par la marchandise ? A cette aune, la gratuité est-elle est encore possible ?
GT : La logique du capitalisme tend à tout transformer en marchandise, et à faire de tout homme un consommateur. C’est une tendance très lourde. Nombre de nos contemporains ne savent plus se comporter dans le monde que comme...
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