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La femme aux cent métiers

PORTRAIT. C’est le combat quotidien d’une vie que nous vous présentons ce dimanche. Celui d’une Française du nord aux prises avec un système professionnel absurde. L’histoire d’une bataille personnelle qui illustre le quotidien et les choix de milliers de femmes en France.

/2020/11/Manuela Saraiva

Manuela Saraiva a 57 ans, et c’est un problème. Un problème depuis près de vingt-cinq ans, en fait, tout bien compté. Depuis qu’elle a fait le choix de privilégier l’éducation de ses enfants à sa carrière professionnelle. « J’ai la double peine comme dirait Nicolas Sarkozy, mais pas pour les mêmes raisons ; je suis une femme et je suis sénior », glisse-t-elle avec ironie. Senior, Manuela a la désagréable impression de l’avoir toujours été ou presque. A partir du jour où on lui a fait comprendre qu’elle avait fait le mauvais choix, elle a vu progressivement l’étau d’un système absurde se refermer sur elle.

Née au Portugal, Manuela est arrivée en France dans les années 1970 alors que sa famille fuyait la dictature de Salazar. Elle a alors 7 ans, mais s’acclimate bien à l’école française. « Je n’ai aucun souvenir d’avoir eu des difficultés d’expression à l’école. Les enfants apprennent les langues très facilement, en général. » Sa scolarité n’est pas tellement différente de celle des autres enfants d’immigrés. Situation géographique et contexte familial ont un pouvoir de décision souvent négligé.

« Vous savez, le nord de la France, c’était une région du textile à l’époque. Et comme beaucoup d’enfants de famille d’immigrés, j’ai intégré à 16 ans une école de textile - qui n’existe plus aujourd’hui d’ailleurs-, pour rentrer vite sur le marché du travail et aider ma famille. C’était comme un CAP de deux ans. Mes parents ont très vite regretté de m’avoir envoyéedans cette école, moi également, mais c’était la logique des choses. »

A l’époque, Manuela est sortie du cursus traditionnel, ce qui l’oblige à reprendre des cours du soir pour passer son bac, d’abord sans succès. Elle ne le sait pas encore, mais les cours du soir deviendront l’un des trois sommets du triangle de sa vie. Persuadée...

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