Le bouchon de la thermos
CHRONIQUE. Vous souvenez-vous des premières bouteilles "Thermos" ? Tout au long de l'été, notre camarade Jean-Paul Pelras nous incite, avec ces chroniques champêtres, à nous replonger dans ce flot de souvenirs qui font notre identité collective. Car pour des lendemains qui chantent, il faut savoir se souvenir d'hier.
:max_bytes(300000)/frontpop/2021/07/chronique-champetre%20-thermos-pelras.jpg)
Voici l’objet, retrouvé le mois dernier sur une étagère du garage familial. Etrange chose que l’on manipule en restant planté dans la pénombre alors que les souvenirs d’un lointain voyage en train ressurgissent.
Alors que le geste d’une mère préparant un pique-nique refait surface pour vous laisser assis, seul dans le vide, face au temps qui court. Oui, étrange bouteille recouverte d’un papier au vert un peu délavé sur lequel est inscrit le mot « Picnic ». Récipient léger et fragile qui a survécu aux chocs, aux déménagements, aux grands nettoyages intergénérationnels et à la plupart de ses utilisateurs.
Voyez ce flacon, imaginé au tout début du dernier siècle en Allemagne par un certain Reinhold Burger qui créa le vide entre deux parois de verre. Depuis, la marque « thermos » déposée dans 115 pays est passée dans le langage commun et qualifie bon nombre de récipients qui se veulent isothermes.
Mais le plus surprenant, voyez-vous, c’est que, après 40 ans d’oubli, le bouchon en liège de ladite fiole patrimoniale ne s’était pas désagrégé. Il fallut alors, vous en conviendrez, faire preuve d’une certaine solennité pour libérer un air emprisonné alors que Charles De Gaulle s’éteignait à Colombey, alors que le gendarme repartait en balade pour la troisième fois du coté de Saint Trop’.
Je devisse donc la timbale en aluminium un peu cabossée, je retire le bouchon et, bien sûr, je respire une odeur de café qui, comme celle d’un bon vin, a su résister aux outrages du temps. Ensuite, et bien ensuite, restons honnêtes, il est des sensations qu’aucune formule ne peut interpréter.