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Pompéi : dans des latrines, une fresque énigmatique

CONTRIBUTION. La civilisation romaine renferme des mystères qui continuent d'interroger les spécialistes. Comme cette étrange fresque trouvée dans les ruines de Pompéi…

POMPEI-FRESQUE


Stéphane Ratti est professeur émérite d’histoire de l’Antiquité tardive à l’Université de Bourgogne-Franche-Comté. Dernier ouvrage paru : Histoire Auguste et autres historiens païens, « Bibliothèque de la Pléiade », Gallimard, 2022


On peut voir au Musée archéologique de Naples une fresque de belles dimensions (voir image ci-dessous) qui pose quelques problèmes d’interprétation aux spécialistes. On l’appelle la « fresque d’Isis-Fortuna » ou encore celle du cacator, on verra plus loin pourquoi. Elle a été retrouvée dans la regio IX (7, 21-22), dans une auberge. Il semble qu’elle ornait un laraire, un autel domestique, dans un espace étroit menant à des latrines dont on ne sait si elles étaient privées ou publiques. La présence d’un laraire en cet endroit ne saurait surprendre puisqu’il y en avait à Pompéi jusque dans les fournils, les boutiques, les cuisines.



Fresque d’Isis-Fortuna avec l’inscription : cave cacator (Pompéi, regio IX, 7, 21-22)
Fresque d’Isis-Fortuna avec l’inscription : cave cacator (Pompéi, regio IX, 7, 21-22)



Isis en majesté, sévère et le regard presque effrayant, occupe la majeure partie de l’espace pictural. On reconnaît sans difficulté la déesse dont le culte privé à Pompéi était largement répandu depuis le IIe siècle avant J.-C. ainsi qu’en atteste, outre le fameux temple que lui consacra un riche particulier, tout juste restauré après le séisme de 62 après J.-C., les nombreuses représentations de la divinité égyptienne en Campanie. On sait aujourd’hui que ce culte n’était pas l’apanage du peuple mais que les aristocrates avaient eux aussi cédé à une certaine égyptomanie plutôt bien informée des rites d’une région devenue province romaine après Actium, en 31 avant J.-C.

On reconnaît aisément Isis sur notre fresque à ses attributs : un modius sur la tête, ce récipient servant à mesurer un boisseau de blé (un peu moins de 10 litres) et évoquant l’importance de l’Égypte dans l’approvisionnement de l’Italie en grains. Dans sa main droite la déesse tient le timon...

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