Quel est le point commun entre Serge Gainsbourg et Sergueï Prokofiev ? Au-delà du prénom, un lieu emblématique : le Conservatoire Rachmaninoff, dont le siècle d'histoire au cœur de Paris, né au lendemain de la Révolution soviétique et de l'exil en France de nombreux Russes, comporte son lot de grands destins croisés et d'anecdotes croustillantes. C'est à ce riche microcosme culturel que l'écrivain Erwan Barillot, qui répond ici à nos questions, et le directeur du Conservatoire Arnaud Frilley se sont intéressés dans Destins russes à Paris.

Front Populaire : Vous avez accouché d’un livre de passionnés pour des passionnés. Quelle a été la genèse de l’écriture de ce livre ?

Erwan Barillot : Tout a commencé avec la découverte de milliers d’archives inédites ayant appartenu aux artistes russes, émigrés à Paris suite à la Révolution de 1917. Des photographies, des lettres, des programmes musicaux, des dessins, des coupures de journaux, des cartons d’invitation, des comptes rendus de réunions ou encore des partitions dédicacées, entreposés depuis plusieurs décennies dans les greniers du Conservatoire Serge Rachmaninoff, devenu à partir des années 1930 l’un des rares lieux de lègue et de sauvegarde de la mémoire russe à Paris.

Le directeur de l’établissement, Arnaud Frilley, également co-auteur du livre, après avoir exhumé ce trésor oublié lors de sa prise de fonction en 2020, en a immédiatement mesuré la portée historique, ainsi que le potentiel narratif. Il m’a proposé de l’aider à raconter l’histoire de ces artistes, sous forme d’un récit qui traverse les générations, de 1924, date de la fondation du Conservatoire, à nos jours, cent ans après. Nous avons ensuite complété l’histoire avec une cinquantaine de témoignages recueillis parmi les personnalités de l’émigration et leurs descendants. Sur les milliers de documents exhumés, nous en avons sélectionnés une centaine, auquel le texte renvoie, et que notre éditeur...