Michel Perraudeau : « Paris n’a jamais voulu comprendre la blessure sociale et morale de la Vendée »
ENTRETIEN. Docteur en sciences de l’éducation, l’essayiste vendéen Michel Perraudeau a publié récemment Vendée 1793 (éd. La Geste, 2021). Nous revenons avec lui sur l’un des épisodes les plus sensibles de notre histoire commune.
Front populaire : Avant toute chose, pouvez-vous nous rappeler rapidement le contexte des Guerres de Vendée ?
Michel Perraudeau : La Révolution de 1789 fut accueillie en Vendée avec l’espoir de grands changements. La fin de l’absolutisme, la justice et la réduction des inégalités étaient attendues, comme dans toutes les autres provinces. Pourtant, une fois les premiers mois d’euphorie passés, les mesures prises par les révolutionnaires parisiens furent considérées par les habitants des régions de l’Ouest comme des atteintes à leur manière de vivre, à leur façon de penser. La Constitution civile du clergé de 1790, et surtout la levée en masse de février 1793, provoquèrent le refus, la révolte puis l’insurrection.
FP : Vous écrivez : « Le phénomène insurrectionnel, que l’on désigne, fréquemment, sous le nom de Vendée militaire, n’a pas d’égal, en destructions et en massacres, dans l’histoire de la France. » Quelle est sa spécificité, selon vous ?
MP : Précisons que ce que l’on appelle « guerre de Vendée » ne se résume pas à un seul département, mais en concerne quatre. Il y a celui qui a donné son nom au soulèvement, car la première défaite d’une armée républicaine venant de La Rochelle, commandée par le général Marcé, face à une armée de paysans, eut lieu en Vendée, le 19 mars 1793. Et se soulevèrent, concomitamment, le nord des Deux-Sèvres, le sud du Maine-et-Loire (les Mauges), le sud de la Loire-Inférieure (le Pays de Retz) ; ces deux dernières terres furent poitevines jusqu’au Xe siècle.
Dans ces territoires, la répression se déroula en deux temps, d’abord en 1793 puis en 1794.
À Paris, le 1er juin 1793, Robespierre et les Montagnards renversent les Girondins. Ils augmentent les troupes pour anéantir l’insurrection. Les rebelles, battus à Cholet, traversent la Loire, remontent jusqu’à Granville, espérant une aide des Anglais. Elle ne viendra jamais. Les combattants...