InternationalGéopolitique

Jean-Baptiste Noé : « Les Vénézuéliens n’ont plus rien, donc ils sont prêts à tout »

ENTRETIEN. L’élection présidentielle et l'annonce de la victoire du gouvernement de Nicolás Maduro ont conduit le peuple du Venezuela dans les rues. L'aube d'une guerre civile ? Pour y voir plus clair, nous avons interrogé Jean-Baptiste Noé, rédacteur en chef de la revue Conflits.

venezuela-maduro-jean-baptiste-noe
© Jimmy Villalta / VWPics/SIPA


Front Populaire : Comment juger la situation politique et socio-économique au Venezuela, dans les grandes lignes ? 

Jean-Baptiste Noé : Les données sont assez simples. En 1989, le PIB par habitant du Venezuela est identique à celui de la Corée du Sud. Aujourd'hui, il est huit fois plus faible : 40 000 $ pour la Corée ; 5 000 $ pour le Venezuela.

L’effondrement social du pays est complet. Tout manque : santé, éducation, alimentation, etc. C’était le pays le plus riche d’Amérique latine dans les années 1970, c’est aujourd'hui l’un des plus pauvres. La politique d’Hugo Chávez (1999-2013), suivi depuis lors par Nicolás Maduro, a ruiné le pays et la population. Le Venezuela est aujourd’hui le pays qui a le plus grand nombre de demandeurs d’asile dans le monde, devant l’Afghanistan (1,2 million de personnes en 2023).

Le « bolivarisme du XXIe siècle » qui reprend tous les codes du communisme militarisé du XXe siècle a conduit à la fuite de millions de Vénézuéliens, qui ont préféré la valise au cercueil.


FP : Les résultats des élections qui ont vu Nicolas Maduro rempiler pour un troisième mandat ont inspiré beaucoup de méfiance. Est-ce justifié ?

JBN : Son opposant principal, Edmundo González Urrutia, était donné vainqueur par tous les sondages indépendants. Très populaire, il avait unifié l’opposition derrière lui. Pourtant, il n’obtient que 44% des suffrages quand Maduro atteint les 51%.

Dans tout le pays, il y a eu des bulletins volés, des urnes remplies, des bureaux de vote fermés alors que la population faisait la queue pour voter. Les infractions sont multiples et à travers tout le pays. Depuis lors, on assiste à des manifestations monstres. Plusieurs statues de Maduro ont été renversées. Les polices parallèles du régime attaquent les manifestants en menant des raids à moto. On recense, pour l’instant, un mort, mais un bain de sang est à...

Vous aimerez aussi