Crise de régime : Emmanuel Macron est-il encore un président légitime ?
CONTRIBUTION/OPINION. La semaine dernière, le chef de l’État a martelé que l’émeute ne l’emportait pas sur les « représentants du peuple ». Mais cette remarque tient-elle encore quand l’exécutif est contraint à passer ses textes en force en raison de la défiance à son égard ?
« Utiliser la Constitution pour faire passer une réforme est toujours une bonne chose si on veut être respectueux de nos institutions », expliqua le président pour justifier le recours au 49 al.3. Auréolé du rejet de la motion de censure de Liot (à 9 voix près), Emmanuel Macron cajola les ouailles parlementaires de son groupe en expliquant qu’il n’y avait pas « pas de majorité alternative ». Plutôt gonflé, de la part d’un président élu qu’avec 38,5 % des suffrages des inscrits. Rappelons qu’au second tour de la dernière élection présidentielle, 2,2 millions de bulletins blancs et 13,6 millions d’abstentionnistes lui ont octroyé une légitimité toute relative. Premier échec auquel s’ajouta celui des élections législatives, puisque Macron ne réussit pas à avoir de majorité absolue à l’Assemblée nationale — ce qui fut une première historique.
La fin de la démocratie libérale ?
Quand on parle aujourd’hui de démocratie, ce sont en premier les mots de tromperie, de corruption et de pourrissement qui nous viennent en tête. Régime mixte qui fonctionna longtemps sur l’État-providence, c’est la « synthèse libéralo-démocratique » qui meurt pendant que le libéralisme économique, l’essor du capitalisme, l’intégration européenne et la perte de souveraineté progressent. Cette réforme des retraites démontre une fois de plus que la démocratie sociale est en train d’expirer, et surtout que le système représentatif et l’appareil de régulation économique s’effondrent conjointement.
Le modèle démocratique actuel, intrinsèquement lié au libéralisme, dénature la notion même de démocratie. La philosophe belge Chantal Mouffe remarquait déjà : « D’une part, nous avons la tradition libérale constituée par le règne de la loi, la défense des droits de l’homme et le respect de la liberté individuelle ; de l’autre, la tradition démocratique dont les idées principales sont celles de l’égalité, de l’identité entre gouvernants et gouvernés et la souveraineté populaire. » Au contraire de la démocratie...