IdentitéSouverainisme

Crise identitaire : quel mythe politique pour la jeunesse souverainiste ?

CONTRIBUTION / OPINION. Qu’elle soit de gauche ou de droite, la jeunesse souverainiste n’a jamais paru si éclatée. La multiplication des « chapelles idéologiques » s’accélère à mesure que la constitution d’une doctrine qui pourrait les rassembler s’éloigne. Quel mythe, sinon celui de l’enracinement, est-il encore capable de porter un projet d’avenir en commun ?

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Les mythes politiques structurent l’imaginaire collectif. Dans Mythes et mythologies politiques, Raoul Girardet (1917-2017) insistait sur l’importance de l’imaginaire pour la communauté politique. La question du mythe national revient à chaque fois qu’une crise traverse le pays. Dans un texte de 1899 intitulé Sur quelles réalités fonder la conscience française ?, Maurice Barrès (1862-1923) se posait déjà cette question lancinante, et qui nous obsède tant, de l’identité. Et justement, le lorrain fut l’un de ceux qui parlèrent le mieux de ce qui est à la base de l’identité et du patriotisme français : l’enracinement.

La sacralisation de l’enracinement

L’enracinement est l’un des derniers mythes nationaux survivants. D’origine agricole (XVIe), le mot entre vite, au début du XIXe, dans le vocabulaire politique. La raison de cette résistance est sûrement due à la sacralisation de sa dimension politico-affective, car, depuis le XIIIe siècle et la fin des croisades, la montée en puissance de l’État s’appuya constamment sur ce sentiment de l’union des Français et de leur terre. Ainsi la promesse du paradis ne concernait plus seulement ceux qui mouraient pour la reconquête des lieux saints, mais bien aussi ceux, comme l’expliqua l’historien allemand Ernst Kantorowicz, qui se sacrifiaient ad defensionem patriae.

Barrès est certainement l’auteur qui comprit le mieux l’idée d’enracinement. Contre l’idée d’une communauté réunie par le seul lien du sang, l’auteur des Déracinés parla du type français comme d’un peuple terrien et « produit de l’histoire ». C’est ce nationalisme tellurique qui permit aux Français, et cela même après l’annexion allemande de 1870, de toujours considérer le territoire lorrain comme appartenant au pays. C’est aussi grâce à ce nationalisme que Barrès lia ensemble ces diverses « familles spirituelles », celles qui étaient mortes pendant la guerre des tranchées de 14-18 (protestants, catholiques, juifs et socialistes).

C’est pour cela que la vraie conception...

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