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Politique : en finir avec la tyrannie de la « complexité »

CONTRIBUTION / OPINION. La complexité du monde contemporain est devenue un paravent rhétorique derrière lequel la classe dirigeante se cache depuis des années. Une excuse bien commode pour justifier son incompétence et pour dissimuler son idéologie.

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Crédits illustration : ©Jacques Witt/SIPA


Depuis quarante ans, la politique française est prisonnière d’un mantra paralysant : la « complexité ». Autrefois utile à la compréhension du réel, cette notion s’est peu à peu érigée en idéologie, au point de devenir le prétexte favori des responsables politiques macronistes pour ne plus agir et sombrer dans l’inertie. Alors que la France est à la croisée des chemins, retrouver le sens de l’action doit être l’objectif premier de notre élite.

Le paravent de l’inaction


Par la naissance au milieu du XXe de la « théorie générale des systèmes », la complexité s’est peu à peu muée en idéologie. Cette théorie américaine, qui a depuis fait florès en France, appréhende le monde comme une imbrication de systèmes divers (politique, social, économique, culturel…) Tout phénomène humain serait lié à une variété de systèmes et facteurs interdépendants. « Tout est lié », affirme en filigrane cette théorie ; un postulat pusillanime, pour brider notre capacité de réfléchir et d’agir.

Dans ce système de croyances, où tout est relatif, la défiance, la paresse et l’ignorance deviennent vite omnipotentes. Puisque tout « fait système », puisque tout est contradictoire et donc complexe, à quoi bon agir ? C’est précisément cette intuition qui encourage l’élite dirigeante à reculer devant le changement, et à déléguer ses pouvoirs aux technocrates, au motif que la politique serait au croisement d’enjeux « systémiques » insaisissables.

En affirmant que tout est « hybride », cette théorie des systèmes, annonciatrice des luttes intersectionnelles d’aujourd’hui, a encouragé l’abolition des frontières et des hiérarchies, l’effacement de la distance entre privé et public ; des repères, sinon des limites qui sont pourtant indispensables à toute action politique. Elle a finalement accouché de la « société liquide » de Bauman, dans laquelle dominent l’incertitude, le déracinement et l’inertie. Plus rien n’est figé, tout est volatile et relatif. Tout est complexe.

Une volonté de manipulation


Cette entreprise de complexification permanente...

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