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Être de gauche : les désillusions d’un homme du peuple

José SERRANO

05/03/2022

OPINION. Aujourd’hui considéré comme un lieu commun, l’abandon des classes populaires par une grande partie de la gauche est le résultat de décennies de trahisons politiques, comme en témoigne notre lecteur.

Être de gauche : les désillusions d’un homme du peuple


J’ai vécu dans ces milieux ouvriers par ma famille et par d'autres personnes ; j’ai travaillé dans l’usine de textile (où mon père travaillait) dès 15 ans l’été, car c’est normal dans cette culture prolétarienne qui est la mienne, d’user de ces mains et de son corps très jeune, d’être un homme à 11 ans, de bêcher, de brasser le béton, de soulever des sacs de ciment, de manier la pioche, de couper le bois, de ramasser les patates avec le paysan du village…

Mais j’étais un bon élève et j’aimais étudier, écrire des rédactions, dessiner (premier texte publié avec un dessin de l’église de mon village dans la revue de l’instituteur). Ce monde des livres existait en parallèle de mon milieu ouvrier et sans l’école, je serai devenu un manuel, c’est certain. Et si Zemmour avait été au pouvoir, il m’aurait destiné à mon milieu d’origine. Très jeune, je me nourrissais de ce savoir scolaire et un crayon à la main, je pouvais écrire, dessiner sur ces pages d’un vieux cahier abandonné. Me serais-je un jour imaginé écrire des livres (à compte d’auteur, les éditeurs parisiens trop loin), composer des poèmes ou des haïkus avec facilité, peindre des tableaux par centaine, ou faire des expos dans les villages avec naturel et passion ? C'était inimaginable !

Mon père et mon grand-père syndicalistes m’ont donné malgré eux cette foi dans la lutte des classes. Et je percevais dans le bourgeois, déjà dans la classe de l’école ou lycée, une manière malsaine et artificielle de vivre : leurs loisirs de sports d’hiver ou de bateau en mer faisaient gronder en moi la révolte. Et que dire quand je découvrais que mon grand-père andalou avait été aux côtés des républicains en Espagne, et donc que le sang de ce peuple opprimé ou...

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