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Procès médiatique de Boualem Sansal : symptôme d’une gauche en transition idéologique

CONTRIBUTION / OPINION. Le timide « oui… mais » vis-à-vis du sort réservé par le pouvoir algérien à Boualem Sansal en dit bien plus sur la dérive idéologique d’une certaine gauche médiatique que sur l’écrivain franco-algérien.

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Crédits illustration : ©Markus Schreiber/NBC/AP/SIPA


C’est étonnant comme ceux qui hurlent sans arrêt au retour des « heures les plus sombres de notre histoire » se décarcassent pour les faire renaître. Ainsi, dans certains médias de service public, très engagés à la gauche de la gauche, la mode est actuellement aux procès par contumace, comme au temps du régime de Vichy (qui, le 2 août 1940, avait fait condamner à mort le général de Gaulle par le même procédé).

Du sévice public au service privé


Le lundi 4 novembre dernier, sur France Inter, c’est d’abord Michel Onfray qui a été accusé de dérive vers l’extrême droite. Puis, le dimanche 24 novembre, sur France 5, ce fut au tour de Boualem Sansal d’être jugé et condamné moralement pour « extrême-droitisation » : les deux procureurs médiatiques chargés du réquisitoire étaient Nedjib Sidi Moussa, un universitaire islamogauchiste (expression qui tend à devenir un pléonasme), ainsi que l’historien Benjamin Stora, inlassable thuriféraire de la junte algérienne et grand chantre de la repentance postcoloniale.

On m’objectera qu’avant de prononcer leur sentence d’excommunication politique à l’encontre du prétendu zemmouriste Sansal (qui a échappé de peu au qualificatif de « vipère lubrique »), nos apprentis Vychinski avaient mollement déploré son arrestation et mécaniquement débité une tirade convenue sur la liberté d’expression. Une fois cette corvée effectuée, les deux compères (c’est plutôt le mot « commères » qui me vient en tête) ont pu se livrer longuement à un « character assassination » en règle à l’égard de l’écrivain franco-algérien.

En laissant deux intervenants incriminer Boualem Sansal sans lui offrir la possibilité d’un droit de réponse, un média de service public (financé par les impôts des Français) a donc rendu un service privé à un gouvernement étranger coutumier des détentions arbitraires. On imagine, après l’émission et, tandis que l’écrivain était déjà dans les fers à Alger, ses deux contempteurs regagner leurs domiciles,...

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